En avril 2020, HEC Stories a proposé aux alumni de partager leur expérience du confinement. Voici le témoignage envoyé par Florian.

Depuis le début de la crise sanitaire, l’industrie du sport tourne au ralenti. Chez Amaury Sport Organisation, entreprise organisatrice notamment du Tour de France pour laquelle j’assure la responsabilité du développement international, les premières décisions difficiles liées au Covid-19 sont tombées très rapidement : l’annulation du Semi de Paris, sur lequel nous devions accueillir 45 000 coureurs, a ainsi été décidée le 29 février, la veille de l’événement seulement. Une semaine plus tard, nous avons amputé d’un jour Paris-Nice, et réalisé sa dernière étape à huis clos. Plus aucun événement cycliste majeur ne s’est tenu depuis.

De manière générale, la crise du coronavirus nous a mis, acteurs du sport business, dans une situation inédite et inconfortable. Les premières réactions dans ce contexte ont été des réflexes de survie. Comment faire lorsque, du jour au lendemain, les revenus décroissent fortement ? Nombre d’acteurs ont eu recours aux instruments mis en place par l’état : chômage partiel, prêts garantis par l’État… Il a fallu ensuite gérer l’opérationnel : comment organiser des annulations, des reports, des relations avec de nombreux partenaires. L’arrêt du championnat aurait ainsi généré 300 à 400 millions d’euros de pertes pour la Ligue 1, et le report des Jeux olympiques de Tokyo, près de… 2,5 milliards d’euros de surcoûts pour la ville !J’ai ensuite été très frappé (mais pas surpris) par la capacité du monde du sport à se serrer les coudes et à faire preuve d’une grande solidarité.

La mise à disposition par Décathlon de ses fameux masques de plongée pour créer des respirateurs en est un exemple frappant, de même que l’initiative solidaire « tous en blanc » lancée par Amaury Médias (société sœur d’A.S.O.) et 200 sportifs, ou les 350 000 euros levés en vingt-quatre heures pour le NHS par Geraint Thomas, le vainqueur du Tour de France 2018.Au cœur de la crise, l’heure est pour moi, comme pour beaucoup de mes homologues, au questionnement. J’ai rejoint le monde du sport convaincu de sa force, des valeurs qui y sont attachées et de ses vertus fédératrices. Comment le sport peut s’en servir pour rebondir et se renouveler ? Si cette crise laissera sans conteste des plaies durables, elle nous donne aussi l’opportunité de prendre du recul sur notre industrie et sur les directions que celle-ci doit prendre. Voici mes réflexions.Les acteurs du sport vont devoir repenser leurs business models et diversifier leurs ressources.

L’arrêt du jour au lendemain des championnats de football, a révélé par exemple l’extrême dépendance du football européen vis-à-vis des droits TV. Dans cette crise, de nombreux acteurs se démarquent en cultivant leur brand equity, en donnant corps à leurs valeurs de marque. Avec cette crise, l’utilité va devenir une valeur de plus en plus attendue : à nous acteurs du sport de multiplier les prises de parole en ce sens et d’aider nos partenaires à la démontrer.Faute d’événements, les acteurs du sport font preuve d’innovation pour se rapprocher de leurs audiences. Je pense au sport virtuel développé en un temps record dans de nombreuses disciplines comme la Formule 1 ou le cyclisme, au rôle des réseaux sociaux, et à la mise à disposition de contenus exclusifs sur les supports digitaux. Nous devrons garder cette créativité et faire de la proximité avec nos fans une priorité. Enfin, cette crise a montré que, quand il est réduit à sa plus simple expression, le sport fait ressortir ses vertus sociétales et sociales. Le sport est un formidable vecteur de bien-être, d’égalité et de solidarité. Sachons mieux remettre en avant ces fondamentaux après la crise, pour retrouver un sport qui fait rêver mais reste proche du quotidien, et en faire un pilier de notre reconstruction.

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