Il a fait le buzz en enflammant la scène d’HEC Paris lors de la cérémonie de remise des diplômes le 11 juin dernier. Mais pourquoi le chanteur iconique de « Magic in the air » est retourné sur les bancs de l’école ? Explications.

Les médias sont nombreux à avoir partagé les scènes de liesse lors du mini-concert du chanteur de Magic System donné à l’occasion de la remise des diplômes sur le campus de Jouy-en-Josas. Mais peu ont exposé les raisons qui ont poussé l’artiste de 44 ans à reprendre les études. C’est au château, dans les contrebas verdoyants du campus, que nous rencontrons Salif Traoré (E.23). Plus connu sous son nom de scène A’Salfo, il déambule au milieu des étudiants de son Global Executive Master en Management (GEMM) Majeure strategic management, et d’autres jeunes diplômés du programme Pact Afrique. « J’avais besoin d’approfondir mes connaissances et d’acquérir de nouveaux outils pour mener à bien nos projets. »

Avec 16 disques d’or et 3 de platine, c’est pour son versant associatif que le chanteur a voulu étoffer ses connaissances. Magic Système naît dans les années 1990 avec une quarantaine de copains issus du même quartier défavorisé au sud d’Abidjan, en Côte d’Ivoire. Ils s’appellent les magiciens. Les débuts sont timides, la bande se resserre autour de quatre membres, et c’est seulement à l’orée des années 2000 que le groupe rencontre le succès. « Premier Gaou », « Bouger Bouger » ou « Magic in the Air », passé au rang de mythe en 2018 puisque le titre est joué dans les stades pendant la Coupe du monde de football à chaque fois que les Bleus marquent un but.

Un chanteur engagé pour la jeunesse ivoirienne

En 2008, A’Salfo créé le Femua (Festival de musiques urbaines d’Anoumabo, le quartier déshérité du sud de la capitale ivoirienne dont il est originaire) avec la volonté de réunir des grandes figures de la scène musicale et de mener, en marge des concerts, des actions sociales et éducatives (carrefours jeunesse, tournois sportifs…). Des initiatives solidaires et caritatives sont également menées avec les fonds récoltés : réhabilitation de logements, d’hôpitaux ou d’orphelinat, dons aux réfugiés… La liste des actions menées grâce à ce festival devenu majeur en Afrique subsaharienne, s’étoffe au fil des années.

« On a un lien ombilical avec le quartier d’Anoumabo et on a voulu aider ce lieu qui nous a tout apporté, explique A’Salfo d’une voix douce et posée. Aujourd’hui, on travaille avec des partenaires financiers, commerciaux et institutionnels et leurs contributions nous permettent de mener des actions. » Depuis 2012, A’Salfo est aussi  ambassadeur de bonne volonté auprès de l’UNESCO en charge de l’alphabétisation et de la culture de la paix. Défenseur de longue date des valeurs liées à l’intégration et à la justice sociale et veut responsabiliser la jeunesse africaine à travers des chansons comme « Children of Africa », « On a espoir » ou encore « L’eau va manquer ».

En avril dernier, le Femua avait pour thème la sécurité alimentaire et l’agriculture durable. « En Afrique, pour une grande partie de la population, certains sujets sont jugés comme scientifiques et à laisser aux experts et aux politiques. Nous, nous avons la chance de faire de la musique, un canal qui peut être utilisé pour s’adresser et sensibiliser directement la jeunesse. Magic System est un groupe éco-citoyen et cette année, nous avons essayé de faire de la sécurité alimentaire une priorité pour tous les États d’Afrique. Si l’on n’y prend pas garde, d’ici à 2030, la pénurie alimentaire fera plus de victimes que le terrorisme ! », met en garde le chanteur et parolier du groupe.

Se donner les moyens d’agir 

Pour mener ces actions sociales, A’Salfo a créé en 2014 la Fondation Magic System, consolidant sa position dans le domaine de l’aide au développement en Côte d’Ivoire. « Je ne voulais pas être en retard dans ce nouveau monde, dans cette ère du numérique, alors j’ai opté pour HEC Paris parce que je savais qu’en suivant ce master, j’allais pouvoir contribuer de manière efficace au développement des industries culturelles et créatives », poursuit-il, fier de son diplôme au même titre que les 300 autres diplômés ce jour-là.

Le jeune diplômé sera en tournée avec le groupe Magic System tout l’été et présidera le jury des Jeux de la Francophonie à Kinshasa. Le groupe doit également composer l’hymne de la prochaine Coupe d’Afrique des nations qui se déroulera en Côte d’Ivoire en 2024.

 

Photographie : HEC Paris Graduation 2023 – © Noé Bugnot

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