Abstract

Les entreprises socialement responsables (RSE) ont la cote, mais sont-elles vraiment plus performantes financièrement que les autres, comme l’affirment certaines études ? C’est la question à laquelle nous nous sommes intéressés. Nous avons élaboré un modèle d’analyse des mécanismes opérant dans le lien entre comportement social et performance financière des entreprises, en tenant compte de l’ensemble des processus sous-jacents, des cadres institutionnels et des acteurs impliqués.
Afshin Mehrpouya (HEC Paris) and Imran Chowdhury (Wheaton College, Massachussetts), Re-Thinking the CSP-CFP Linkage: Analyzing the Mechanisms Involved in Translating Socially-Responsible Behavior to Financial Performance, Advances in Strategic Management, Vol. 38, Forthcoming, HEC Paris, Research Paper No. ACC-2018-1253, March 2018.

3 questions à Afshin Mehrpouya, professeur associé à HEC Paris

De plus en plus d’investisseurs s’intéressent aux entreprises socialement responsables. Effet de mode ou véritable changement de paradigme ?

Nombre de multinationales et de PME affirment que le capitalisme doit contribuer à rendre la société meilleure. Prenez Google, l’un des groupes les plus puissants de la planète : son slogan était d’abord « don’t be evil » puis il est devenu « do the right thing » avec la création de la holding Alphabet. Et effectivement, du côté des investisseurs, beaucoup d’acteurs disent prendre en compte les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans leurs décisions. Qu’en disent les économistes ? Depuis les années 1970, tout un pan de la recherche tend à prouver que les entreprises socialement responsables surpassent leurs pairs en termes de pérennité et de performance financière. Nous avons voulu questionner ce lien.

Quelle corrélation peut-on établir entre la RSE et la valeur en Bourse ?

Cela dépend d’abord de l’horizon d’investissement. Les politiques sociales et environnementales paient à long terme. Les sociétés en difficulté financière, ou qui opèrent sur des secteurs volatils, n’ont pas d’autre choix que de se concentrer sur le court terme. Par ailleurs, bien que l’investissement socialement responsable soit en progression, la majorité de l’actionnariat reste tournée vers le court terme. Les investisseurs attendent des rendements élevés. Dans les assemblées générales, environ 75 % des propositions liées à la RSE recueillent moins de 20 % des votes.

La prise de conscience est donc insuffisante ?

Dans notre économie mondialisée, le consommateur se situe à des milliers de kilomètres du producteur. Il n’existe pas le même sentiment de destin commun qu’à l’époque où on fabriquait et on consommait au même endroit. Cela constitue un obstacle à la reconnaissance de notre responsabilité. Pour ne rien arranger, les entreprises sont de moins en moins intégrées verticalement. Le B2B progresse. Or il est moins visible, moins exposé à l’opinion publique.

Que faire pour pousser les entreprises à adopter des comportements plus vertueux, même dans le B2B ?

Renforcer la réglementation. Les médias doivent enquêter davantage sur les pratiques de ces sociétés pour susciter un débat public sérieux. La formation des managers à l’éthique fait aussi partie des solutions envisageables.

RSE Afshin Mehpouya

Afshin Mehrpouya
Professeur associé à HEC Paris, Afshin Mehrpouya s’intéresse aux investissements responsables et à l’impact des notations écologiques, sociales et de gouvernance (ESG). Titulaire d’un doctorat de l’ESSEC, il détient un diplôme de médecine de l’Université de Téhéran et un MBA de la Schulich School of Business de Toronto.

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