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Carrières : « La femme, cette scientifique »
(Au commencement était… David Graeber & David Wengrow ;
Editions Les Liens qui libèrent ; 2021)

David Graeber, qui a enseigné à Yale puis à la London School of Economics, fut un des anthropologues les plus en vue avec ses idées, ses actions et ses ouvrages : il s’est fait connaitre avec Dette : 5000 ans d’histoire (« Debt: The First 5000 Years ») qui lui a valu une renommée internationale ; Bureaucratie, l’utopie des règles (« The Utopia of Rules: On Technology, Stupidity, and the Secret Joys of Bureaucracy ») l’a mené à assurer de nombreuses conférences, notamment une mémorable avec Peter Thiel, co-fondateur de Paypal & investisseur, pour discuter de son chapitre « Des voitures volantes et de la baisse du taux de profit » ; il s’est fait connaitre du grand public avec son article puis son ouvrage sur les Bullshits Jobs (terme dont il a inventé le concept).
Il s’est associé à son ami et compère David Wengrow, archéologue, pour préparer pendant 10 ans son dernier livre, dont le manuscrit a été finalisé 3 semaines avant sa mort fin 2020.

« Au commencement était… Une nouvelle histoire de l’humanité » (« The Dawn of everything : A New History of Humanity ») se propose de remettre en question rien de moins que notre histoire, à commencer par celle des femmes et leur impact sur le reste de l’humanité.

Ce thème est largement présent dans le livre (notamment en lien avec les peuples natifs d’Amérique) et un long passage a particulièrement attiré mon attention, dans la continuité de notre partage de 3 articles clés de L’Atlas des Femmes.

Nous avons alors contacté les éditions les Liens qui libèrent, que nous remercions vivement, pour partager avec vous ce passage de 7 pages du chapitre 6 « Les jardins d’Adonis. La révolution qui n’a jamais eu lieu : comment les peuples du Néolithique ont esquivé l’agriculture » intitulé « La femme, cette scientifique » qui souligne le rôle crucial des femmes dans l’avènement de l’agriculture et plus largement notre relation à la terre, donc aux fondations même de nos sociétés.

> Voici quelques extraits pour vous donner envie d’en lire plus :

« Refuser un récit édénique des origines de l’agriculture, c’est aussi rejeter, ou du moins remettre en question, les hypothèses sexuées tapies derrière lui.

Ce qui se trouve évacué dans tous ces récits, volontairement ou non, ce n’est ni plus ni moins que la contribution des femmes. Presque partout dans le monde, ce sont elles qui récoltent les plantes sauvages et les transforment (en aliments, en remèdes ou en objets plus complexes tels que paniers ou vêtements). D’ailleurs, sur le plan grammatical, ces activités conservent parfois le genre féminin même lorsqu’elles sont exécutées par des hommes. C’est sans doute ce qui se rapproche le plus d’un universel anthropologique.

L’une des difficultés que l’on rencontre quand on étudie l’innovation scientifique préhistorique, c’est de se représenter un monde sans laboratoires – ou plutôt, un monde où tout pouvait faire office de laboratoire. Sur ce point, l’analyse de Lévi-Strauss est beaucoup plus pertinente : « […] il existe deux modes distincts de pensée scientifique, l’un et l’autre fonction, non pas certes de stades inégaux du développement de l’esprit humain, mais des deux niveaux stratégiques où la nature se laisse attaquer par la connaissance scientifique : l’un approximativement ajusté à celui de la perception et de l’imagination, et l’autre décalé ; comme si les rapports nécessaires, qui font l’objet de toute science – qu’elle soit néolithique ou moderne –, pouvaient être atteints par deux voies différentes: l’une très proche de l’intuition sensible, l’autre plus éloignée. »

Vues sous cet angle, les «origines de l’agriculture» ressemblent moins à une transition économique qu’à une révolution «médiatique » (ou révolution des supports) doublée d’une révolution sociale. Tous les domaines étaient concernés: l’horticulture, l’architecture, les mathématiques, la thermodynamique, la religion, la répartition des rôles entre les sexes… Nous n’avons aucun moyen de savoir précisément qui faisait quoi dans ce meilleur des mondes, mais il est certain que le labeur et le savoir féminins ont joué un rôle décisif dans sa naissance. »

>> Vous trouverez ci-dessous le PDF avec l’intégralité du passage en question ainsi que la 4ème de couverture et la table des matières pour vous faire une idée de l’ouvrage, ainsi qu’une version texte un peu plus bas.

 

Grégory Le Roy, pour HEC Alumni



PRESENTATION DE L’OUVRAGE

« Depuis des siècles, nous nous racontons sur les origines des sociétés humaines et des inégalités sociales une histoire très simple. Pendant l’essentiel de leur existence sur terre, les êtres humains auraient vécu au sein de petits clans de chasseurs-cueilleurs. Puis l’agriculture aurait fait son entrée, et avec elle la propriété privée. Enfin seraient nées les villes, marquant l’apparition non seulement de la civilisation, mais aussi des guerres, de la bureaucratie, du patriarcat et de l’esclavage.

Ce récit pose un gros problème : il est faux.

David Graeber et David Wengrow se sont donné pour objectif de « jeter les bases d’une nouvelle histoire du monde ». Le temps d’un voyage fascinant, ils nous invitent à nous débarrasser de notre carcan conceptuel et à tenter de comprendre quelles sociétés nos ancêtres cherchaient à créer.

Foisonnant d’érudition, s’appuyant sur des recherches novatrices, leur ouvrage dévoile un passé humain infiniment plus intéressant que ne le suggèrent les lectures conventionnelles. Il élargit surtout nos horizons dans le présent, en montrant qu’il est toujours possible de réinventer nos libertés et nos modes d’organisation sociale.

Un livre monumental d’une extraordinaire portée intellectuelle dont vous ne sortirez pas indemne et qui bouleversera à jamais votre perception de l’histoire humaine. »

LES AUTEURS

David Wengrow (à g) et David Greaber, Londres, 25 janvier 2019.

David Graeber (1961-2020) était l’un des intellectuels les plus en vue et les plus ancrés dans les réalités socio-économiques de son époque. Penseur iconoclaste, figure de proue d’Occupy Wall Street, anarchiste, historien de la dette, pourfendeur de la bureaucratie capitaliste, inventeur du concept des « bullshit jobs », il aura marqué son temps de sa malice et de son intelligence sensible. Docteur en anthropologie et économiste, il enseignait ces deux matières à la London School of Economics. Il est notamment l’auteur de Dette : 5 000 ans d’histoire (2013, LLL), Bureaucratie (2015, LLL) et Bullshit Jobs (2018, LLL).

David Wengrow est archéologue et professeur à l’Institut d’archéologie de l’University College de Londres (UCL). Il a publié plusieurs livres et articles universitaires sur des sujets ayant trait à l’origine de l’écriture, l’art antique, les sociétés néolithiques ou encore l’émergence des premiers États en Égypte et en Mésopotamie.

Le livre a été traduit par Elise Roy

> Retrouvez toutes les informations sur le site Les Liens qui libèrent.

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