Alain Caradeuc (H.70) : l’histoire derrière son premier roman
Entrepreneur de renom dans les secteurs du luxe, de la mode et du design, et président du hub luxe et création chez HEC Alumni, Alain Caradeuc publie son premier roman « Mort d’une Cariatide », (LibriSphaera Maison d’édition). Fort d’un parcours marqué par des succès dans des univers prestigieux, il trouve dans l’écriture une forme d’évasion et de thérapie. À travers ce roman à la fois d’aventure, d’espionnage et de passion amoureuse, il mêle géopolitique, réflexion sociale et évolution personnelle, invitant ses lecteurs à plonger dans l’âme humaine et ses ressources insoupçonnées. Dans cette interview, l’auteur raconte son parcours, dévoile ses inspirations et la quête de sens qui guide sa plume.
HEC Stories : Pouvez-vous nous raconter votre parcours en quelques mots ?
Alain Caradeuc : J’ai eu trois grandes phases dans ma carrière. La première était dans les secteurs du luxe, de la mode et du parfum. Dans les années 70’, j’ai décidé de partir à New York où j’ai travaillé pour une entreprise française spécialisée dans le packaging, j’y suis resté deux ans et demi. De retour à Paris, j’ai ensuite passé 25 ans dans l’univers de la mode : d’abord en tant que directeur export de la maison Léonard, puis comme associé de Thierry Mugler, avec qui j’ai fondé l’entreprise et trouvé les premiers partenaires financiers pour développer la marque. J’ai aussi été l’un des dirigeants d’Esprit pendant 5 ans en Europe.
En 1994, j’ai opéré un tournant vers le design et l’architecture d’intérieur. J’ai dirigé un fabricant de mobilier très haut de gamme Hugues Chevalier, et développé la marque en France, aux États-Unis et en Italie avec le soutien de la famille Vuitton. La crise des subprimes de 2009 a mis fin à cette aventure, et j’ai alors choisi de devenir consultant en stratégie et d’investir dans des entreprises des secteurs du luxe, de la mode et du design.
En parallèle, je me suis beaucoup impliqué chez HEC Alumni, devenant président du Club Luxe & Création avant de prendre la tête du Hub Luxe & Cosmétiques, un rôle que j’occupe toujours aujourd’hui.
HEC Stories : Depuis quand avez-vous envie d’écrire ?
A.C. : J’ai pris la plume pour la première fois en 1973 à New York, après la guerre du Kippour et la crise pétrolière qui en a découlé. J’étais encore à New York et j’avais commencé à écrire un synopsis sous forme de dystopie géopolitique, mais l’écriture ne s’est vraiment imposée à moi que bien plus tard, après un épisode personnel douloureux. Elle est devenue à la fois une évasion et une forme de thérapie. J’accorde une grande importance à la précision des mots, à la recherche du style, et j’ai trouvé dans l’écriture un moyen d’exprimer ce que j’avais enfoui au plus profond de moi.
HEC Stories : Comment vous est venue l’idée de ce second roman ?
A.C. : J’ai d’abord écrit et réécrit un premier roman, « Boston Blues », pendant 18 ans ! Long de 600 pages, il n’a pas encore été publié. Mais il m’a été d’un profond secours car il a ouvert la voie ! Ce second roman est né d’une rencontre marquante, il y a 40 ans, avec un peintre parisien prometteur dont j’ai perdu la trace. Cette figure m’a inspiré le personnage de Gerson, un artiste en quête de sens et de reconnaissance. J’ai imaginé ce qu’aurait pu être sa vie si une rencontre décisive l’avait conduit sur un chemin différent.
HEC Stories : Pouvez-vous nous en dire plus sur l’intrigue ?
A.C. : Oui, c’est est un roman d’aventure et d’amour, mais aussi une réflexion sur les enjeux sociétaux et géostratégiques. L’histoire suit Gerson, un homme immergé dans le milieu artistique de Saint-Germain-des-Prés, qui rencontre Myriam. Cette femme l’entraîne malgré lui dans un univers qu’il ne soupçonnait pas : celui des services secrets et de la lutte contre des forces subversives. Ce personnage, d’abord sceptique et peu préparé, découvre en lui des ressources insoupçonnées. J’aime explorer comment les épreuves transforment les individus et les révèlent à eux-mêmes.
HEC Stories : Pourquoi avoir choisi le Proche-Orient, et en particulier le Liban et Israël, comme décor pour certaines des scènes les plus marquantes ? Vous vouliez confronter le lecteur à une réalité brûlante ?
A.C : En effet, c’était mon intention. Mais au-delà du contexte géopolitique, ce qui m’intéressait, c’était l’évolution d’un personnage. Un homme confronté à une réalité étrangère et qui change profondément au fil du récit. Au début, c’est un séducteur, un opportuniste qui ne s’engage pas vraiment. Puis, il rencontre une femme et, en s’engageant pour elle, il se retrouve impliqué dans une cause qui le dépasse. Son regard sur le monde évolue, tout comme son rapport à lui-même.
HEC Stories : Vous vous êtes beaucoup documenté pour écrire dans ce contexte ?
A.C : Énormément. Je suis très renseigné sur les questions d’armement, un aspect important du roman. J’ai des amis dans ce secteur, et puis je suis fils d’officier. Je suis né à Saint-Cyr. Cette dimension militaire fait partie de mes valeurs : l’engagement, le don de soi. Quand je parle de la plaine de la Bekaa, par exemple, c’est du vécu. Je m’y suis rendu, tout comme dans d’autres lieux mentionnés dans le livre. J’ai évité le journalisme pur, mais tout ce que je décris est authentique.
HEC Stories : Des personnages réels sont-ils intégrés au roman ?
A.C :. Oui, il m’a semblé indispensable d’évoquer certains personnages essentiels. Par exemple, Hassan Nasrallah, mais je reste évidemment dans une attitude prudente de conteur et non de moraliste ou de commentateur politique. Je voulais éviter de coller servilement à l’actualité, même si mon histoire s’ancre profondément dans la réalité géopolitique et les drames qu’elle a engendrés. Certains noms ont donc été retirés. Je précise que ce roman a été terminé en juin 2023. Il est d’une certaine façon prémonitoire.
HEC Stories : On suit l’épopée du personnage principal et sa trajectoire évolue sensiblement au fil des pages. Est-ce que l’amour ou une émotion forte peut, selon vous, nous faire emprunter des chemins insoupçonnés au départ ?
A.C : Je crois que nous avons tous en nous des ressources insoupçonnées. On est souvent enfermé dans un certain conformisme, mais une épreuve peut révéler ce dont on est réellement capable. Cette histoire est aussi une réflexion sur la résilience et la force intérieure.
HEC Stories : Il y a presque une dimension philosophique dans votre livre ?
A.C : En effet : il y a plusieurs niveaux de lecture. C’est un roman d’espionnage, mais aussi un roman psychologique et une réflexion sur la société. Ça le le rend un peu inclassable et a d’ailleurs compliqué sa publication dans l’édition traditionnelle. Finalement, un éditeur passionné de géopolitique, Philippe Fouchard, a cru en ce projet et a décidé de le publier.
HEC Stories : Que souhaitez-vous transmettre à travers vos livres ?
A.C. : L’écriture me permet de traiter du lien entre la sphère intime et les grands mouvements sociétaux. Nos choix individuels ont des répercussions bien au-delà de notre propre existence, comme l’effet papillon. Mes romans sont une façon de donner à voir cette interconnexion, tout en offrant aux lecteurs des récits captivants qui, je l’espère, résonneront avec leurs propres expériences de vie.
HEC Stories : Pourquoi avoir choisi « La Cariatide » dans le titre ?
A.C : Myriam, l’héroïne, joue un rôle central, comme une cariatide dans l’architecture : elle soutient, elle porte. Elle n’est pas une guerrière au sens strict, mais elle agit, stabilise, elle est essentielle à l’équilibre de l’histoire. Il y a aussi une dimension artistique que vous découvrirez en lisant.
HEC Stories : Y a-t-il un message sur la place des femmes dans votre roman ?
A.C : Oui, sans être un manifeste féministe, le livre met en lumière le rôle clé des femmes. Myriam incarne la force, la lucidité, la prise de risque. La place des femmes est un bon indicateur du niveau de démocratie d’un pays. À travers ce personnage, je rends hommage aux femmes qui jouent un rôle fondamental, souvent dans l’ombre.
HEC Stories : Si vos lecteurs devaient retenir une seule chose en refermant votre livre, ce serait quoi ?
A.C : « Le pire n’est jamais sûr. » Nous avons tous en nous les moyens de faire face à l’adversité. Il faut apprendre à se révéler, à ne pas passer à côté de son potentiel. C’est une quête qui peut durer toute une vie, mais qui est essentielle.
HEC Stories : Avez-vous mis une part de vous dans votre personnage principal ?
A.C : Bien sûr, forcément. Comme lui, j’ai une part d’hédonisme et de relativisme, peut-être de superficialité. Mais aussi une solidité intérieure absolue qui se révèle dans l’épreuve. Et des convictions inébranlables ! Un ami m’a dit un jour : « Tu es un marin breton, tu te révèles dans la tempête. » J’aime cette image, et je pense qu’elle s’applique aussi à Gerson, mon personnage. Il évolue, il prend les choses en main, il découvre sa véritable nature. Il apprend à souffrir pour ce qu’il aime. Et c’est peut-être en ça que je me retrouve le plus en lui.
Commander « Mort d’une Cariatide », ici
Dédicace de l’auteur jeudi 13 février 2025, chez Lamartine : 118, rue de la Pompe, 75016
Published by Daphné Segretain