Du 2 au 9 octobre, un groupe d’une vingtaine de membres d’HEC Alumni a visité la Norvège dans le cadre d’un voyage d’étude. Nous adressons nos vifs remerciements à l’ambassade de France à Oslo, à la Chambre de commerce franco-norvégienne, au ministère des Affaires étrangères norvégien, au Parlement norvégien (Storting) et à Equinor pour leur soutien et leur chaleureux accueil. Voici quelques réflexions que nous tirons de ce voyage. La version intégrale du texte est disponible auprès d’HEC Seniors.

La Norvège, source d’inspiration. Dans une Europe doutant d’elle-même, la Norvège fait figure d’exception. Depuis la découverte de considérables gisements d’hydrocarbures au large de ses côtes dans les années 1970, elle a fait progresser de manière spectaculaire le niveau de vie de ses habitants, sans tomber dans le piège que sa richesse soudaine lui tendait. Elle a su épargner une part importante de ses revenus nouveaux, tout en préservant la paix sociale et, par une politique étrangère intelligente, ses intérêts dans le concert européen.

Un bon citoyen européen. La Norvège jouit d’un statut spécial au sein de l’Europe. Sans être membre de l’UE, elle lui est étroitement associée et transpose de manière quasi automatique dans sa législation les accords passés entre pays de l’Union. En contrepartie, elle a libre accès au marché européen, à l’exception de la pêche et de l’agriculture, qu’elle-même souhaite protéger. Les relations de la Norvège et de l’UE, loin de batailles de principe, se caractérisent par le réalisme et le souci d’efficacité. La Norvège est résolument européenne, mais elle souhaite préserver son indépendance et son modèle social et disposer à son gré de ses richesses pétrolières.

Le bon usage du pétrole. La Norvège a su capter et conserver pour elle-même l’essentiel de ses revenus pétroliers. Bien que la prospérité du pays soit fortement liée à l’exploitation des ressources du sous-sol marin, qui comptent pour 67 % du total dans ses exportations, elle n’est pas devenue un pays pétrolier au sens étroit du terme. Les hydrocarbures représentent seulement 22 % de son PIB. La Norvège a su développer des activités à forte valeur ajoutée, non seulement dans le secteur parapétrolier, mais aussi dans des domaines tels que les énergies nouvelles. Le pétrole apporte à l’État norvégien environ 15 % de ses recettes et a permis la mise en œuvre d’une politique sociale généreuse. En 2019 le déficit budgétaire non pétrolier est voisin de 6,5 % du PIB, mais il est compensé par les revenus du Fonds pétrolier qu’a constitué le pays pour gérer ses richesses accumulées. Ce fonds a un actif voisin de 1 000 milliards de dollars US, ce qui en fait l’un des plus grands du monde. La hausse de la valeur des actifs du Fonds, dans le passé récent, a été de 3-4 %, soit 30-40 milliards de dollars par an, ce qui équivaut à près de 2 fois le montant des revenus distribués à l’État. L’épuisement de ses gisements, prévu pour 2050, ne laissera pas le pays sans ressources.

Une conscience écologique. La Norvège a bâti une infrastructure hydro-électrique qui lui permet de produire sans émission de CO2la totalité de l’électricité qu’elle consomme. Le pays investit aussi dans les énergies nouvelles, éoliennes en particulier, sur terre et sur mer, ainsi que dans la captation et le stockage du carbone.

Le gardien de la porte du Nord. La façade côtière du pays est longue de 2 500 km. Il dispose ainsi d’une position géostratégique exceptionnelle. La Norvège peut surveiller des zones maritimes très étendues, ce qui devient plus important que jamais, du fait de la fusion des glaces dans l’Arctique. La Norvège est membre de l’OTAN depuis 1949 et très proche militairement des États-Unis.

Le succès de la sagesse. La Norvège a su mettre à profit l’opportunité historique que représentait pour elle la découverte de gisements pétroliers à proximité de ses côtes. Elle a fait bon usage de l’argent gagné en installant la prospérité parmi les siens tout en préservant l’avenir. Elle a ainsi échappé à la malédiction qui frappe le pêcheur de Steinbeck après sa découverte de la perle noire. La Norvège, partenaire économique et stratégique majeur pour les pays occidentaux, en particulier la France, est digne de nos méditations.

Anthony Shea (H.68), VP HEC Seniors

Published by