À l’origine de nombreuses innovations telles que les monnaies numériques, la vente d’objets virtuels ou encore les mondes virtuels, le jeu vidéo s’imprègne prudemment des technologies du web3… Au fond, en a-t-il besoin ? Axel Buendia à la tête du Cnam-Enjmin, École nationale du jeu et des médias interactifs numériques, et Stéphanie Bocquillon (H.99), responsable communication du Cnam-Enjmin, répondent à HEC Stories.

Article réalisé en partenariat avec le Cnam-Enjmin

 

 

Est-ce que le web3 a déjà investi le domaine des médias interactifs ?

Axel Buendia : Depuis toujours, les jeux vidéo inspirent ou s’inspirent des technologies venant d’autres secteurs. Le web3 et la blockchain ne font pas exception, même si, dans ce domaine, ils n’ont pas encore vraiment percé. Pourtant, certaines des applications du web3 sont présentes dans le jeu vidéo depuis longtemps. Ainsi, des monnaies virtuelles ont été créées dans les jeux, mais toutes gérées par des organisations centralisées, sans que cela ne dérange les joueurs. Concernant les NFT, une fois encore, dans le jeu vidéo, le principe de valorisation et de marché d’objets virtuels existe depuis longtemps. Et ce sont les créateurs du jeu qui centralisent les échanges, même si parfois, des transactions leur échappent. Ainsi, dans des MMO (Massively Multiplayer Online), des utilisateurs ont déjà échangé des personnages ou des objets virtuels rares contre une rétribution réelle. Les NFT ou n’importe quelle technologie sécurisée permettraient de mieux contrôler les échanges.

Les jeux vidéo et leurs mondes virtuels ont-ils posé les bases des métavers ?

A.B. : En effet, le jeu vidéo était en avance en ce domaine. Dès 1997, Cryo et Canal+ créaient Le Deuxième Monde, un Paris virtuel en 3D dans lequel les joueurs pouvaient vivre des aventures, socialiser… Mais plutôt que d’accepter les réalités virtuelles trop conventionnelles, dénuées d’originalité et d’ambition, proposées aujourd’hui par plusieurs Gafam, peut-être devrions-nous nous interroger sur ce que pourraient apporter ces nouveaux mondes, ces nouveaux espaces d’expressions et de rêves. C’est dans ce cadre que le Cnam-Enjmin a créé un atelier d’expérimentation en partenariat avec l’ÉESI (École européenne supérieure de l’image).

Quelles sont les questions posées par le web3 dans les médias interactifs ?

A.B. : Ces questions sont plutôt d’ordre éthique. Nous enseignons à nos étudiants et étudiantes à comprendre ces technologies mais aussi à se poser les bonnes questions. Peut-on imaginer un web3 où l’utilisation des services n’implique pas la cession de données personnelles ? Sur quel modèle économique ? Doit-on envisager une souveraineté de l’État pour certains services jugés sensibles ? Nous collaborons, pour nos enseignements, avec plusieurs sociétés du web3 (Enjin pour les NFT et Scub) et avons développé des projets de recherche ou d’expérimentation. Nous travaillons aussi avec des partenaires, dont Mainbot et son robot Winky.

Au-delà du web3, quels sont les buts pédagogiques de votre école ?

Stéphanie Bocquillon : Notre mission principale est de former des professionnels, des chercheurs et des artistes de haut niveau dans le secteur des médias interactifs numériques. Ces métiers ne se limitent plus au domaine vidéoludique ; ils touchent désormais les process industriels, la pédagogie, les télécoms, l’audiovisuel… Nos diplômés peuvent répondre à des besoins en réalité augmentée ou virtuelle, en technologies immersives et en conception 3D pour l’industrie 4.0. Ils trouvent aussi des postes dans le cinéma d’animation, l’édition numérique, la communication ou encore dans des structures travaillant sur les villes intelligentes, les parcs d’attractions, les métavers. Ces structures peuvent être des musées ou des cabinets d’architectes… Nous avons également mis en place un lieu de recherche fondamentale et appliquée dans le champ des médias interactifs. Et grâce à notre programme d’incubation all4GAMES, nous accompagnons les jeunes diplômés entrepreneurs vers la création de leurs studios de jeux.

Quelles sont vos principales formations ?

S.B. : Nous déployons quatre diplômes : la licence informatique jeux vidéo, le diplôme d’ingénieur·e informatique et multimédia, le master jeux et médias interactifs numériques coaccrédité par le Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) et l’Université de Poitiers (double diplomation possible avec Cologne Game Lab) et le Mastère Spécialisé Interactive Digital Experiences en partenariat avec GOBELINS l’école de l’image et accrédité par la Conférence des grandes écoles. Nous mettons aussi au point des formations sur mesures pour des entreprises.

Cnam-Enjmin
Créée en 2001 au sein du Campus Image Magelis d’Angoulême, en Charente, l’École nationale du jeu et des médias interactifs numériques Cnam-Enjmin collabore avec des universités et centres de recherches dans le monde entier et accueille des étudiant(e)s de différents pays. Elle fait partie depuis 2020 des écoles d’application de l’École polytechnique. L’école accueille cette année 250 élèves et son réseau compte plus de 1 200 alumni.

 

 

Axel Buendia-Cnam-Enjmin/Spir.Ops
Axel est l’un des fondateurs de Spir.Ops, une société créée en 2004 qui fournit des services et outils autour du thème de l’Intelligence Artificielle. Un doctorat en intelligence artificielle obtenu en 2003 et plusieurs années passées à travailler dans diverses industries, lui ont procuré l’expérience nécessaire à la création d’outils avancés pour concevoir les comportements de demain. Depuis la création de Spir.Ops, il a collaboré sur de nombreux projets collaboratifs d’envergure, aussi bien sur des jeux vidéo, que sur des robots et ou encore des simulations urbaines. Professeur Associé (PAST) au Cnam depuis 2008 il enseigne l’Intelligence Artificielle au Cnam-Enjmin et a participé à la création de l’EICnam Sciences et Technologies des Médias Numériques. Ses activités de recherches se focalisent sur les systèmes décisionnels. Sa double casquette lui permet de rester connecté avec la recherche tout en restant à l’écoute des besoins industriels et anticiper leurs futures évolutions de l’intelligence artificielle. Nommé en 2020, il est professeur du Cnam, titulaire de la Chaire Médias interactifs numériques et directeur du Cnam-Enjmin.

Stéphanie Bocquillon (H.99)-Responsable communication du Cnam-Enjmin
Après un début de carrière dans les services marketing d’Unilever, Campbell puis de Microsoft, elle s’est spécialisée dans la communication et a intégré le Cnam, établissement d’enseignement supérieur dédié à la formation professionnelle tout au long de la vie, en 2012. Elle est responsable depuis plus de 10 ans de la communication du Cnam-Enjmin, la grande école publique du jeu vidéo et du numérique située à Angoulême.

Visuel réalisé par Astrid MERIT, étudiante en master jeux et médias interactifs numériques (parcours conception visuelle) – promo 2021-2023.
Réalisé en collaboration avec le CNAM ENJMIN

 

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