La Nouvelle Faculté Libre est en deuil de son directeur Jean-Michel Fourcade, décédé le 13 avril dernier dans sa 77e année. D’innombrables témoignages d’affection et de gratitude l’ont accompagné dans ce « grand passage ». Son parcours est une illustration du conte taoïste Le Pot fêlé : « Une Chinoise rapportait chaque jour l’eau nécessaire à sa maison ; elle trottinait ainsi avec ses deux pots accrochés à sa longue perche. Par malheur, l’un des pots était fêlé et perdait son eau tout au long du chemin si bien qu’il arrivait toujours à demi-rempli. De longues années passèrent avant que le pot fêlé, désespéré de sa piètre performance, demandât à être déchargé de son office. La paysanne le consola ainsi : “par ta fêlure, tu as arrosé chaque jour les bords du chemin, permettant aux fleurs de s’y épanouir jusqu’à pouvoir décorer ma table”. »Acceptons nos défauts qui peuvent être des trésors pour les autres…

Ci-après, cinq camarades témoignent.« Jean-Michel a été en France le vrai pionnier de la thérapie humaniste et relationnelle née en Californie dans les années 1970 : Bioénergie, Gestalt, groupes de rencontres cri primal, travail régressif en piscine d’eau chaude… Il a amené et expérimenté en France ces différentes pratiques et a fondé en 1972 le CDPH, Centre de développement du potentiel humain, pionnier de la psychologie humaniste en France, dans la logique des travaux de Rogers, Maslow, Lee Cooper, Perls, Lowen, Pierrakos, Berne, etc. », m’avait confié Vincent Lenhardt (HEC 65), son vieil ami et complice, thérapeute et executive coach, connu pour avoir introduit le coaching en France en 1988, qui est resté très lié à lui jusqu’à présent. Vincent rejoindra le CDPH, en qualité de co-directeur de 1976 à 1981. Ils animeront beaucoup de séminaires ensemble et publieront en 1981 un livre, Les Bio-Scénarios (synthèse de la bioénergie et de l’analyse transactionnelle), réédité en 2007 chez Dunod.

En dix ans s’établit ainsi ce qui est devenu sans doute la meilleure école de thérapie en France.Suivra en 1991 la NFL (Nouvelle faculté libre), association pour la promotion de la « psychanalyse intégrative » (émotions, corps, inconscient, spiritualité, travail de groupe).Ce travail de construction et de structuration se poursuit par la fondation du SNPPsy (Syndicat national des praticiens en psychothérapie), permettant aux meilleurs thérapeutes formés par cette filière en France de défendre leur identité et leurs apports, face à des professionnels formés dans un cursus beaucoup plus universitaire et académique et de faire reconnaître leur profession novatrice. Jean-Michel est reconnu par ses pairs comme l’un des meilleurs thérapeutes français. Il était aussi licencié en droit, DES de philosophie, docteur en psychologie clinique, psychanalyste. En 2016, il publie chez Eyrolles Les Personnalités limites( hypersensibles, à fleur de peau, écorchés vifs, tous « boarderline ») Après trois ans d’une longue maladie,il s’est éteint à Paris le 13 avril, entouré de son fils et d’amis proches.

Jean Pierre Richard (H.66)

Je connaissais bien Jean-Michel pour avoir été initié, grâce à lui, à la bioénergie, une méthode de travail sur soi, issue de l’œuvre de Wilhem Reich très en vogue dans les années 1970. Une découverte essentielle pour moi qui a débuté par un très étonnant séminaire dans le cadre tout aussi surprenant du domaine des Courmettes (www.courmettes.com). Découverte suivie de celle de la « gestalt therapy » (Beverly Silverman) et de l’« aqua-energetics » (travail régressif en piscine d’eau chaude créé par Paul Bindrim). Jean-Michel était, sans conteste, une personnalité attachante, animée par la bienveillance et par la curiosité, d’où son intérêt pour les techniques de développement personnel très nouvelles à l’époque et d’inspiration new-age et le mouvement américain du potentiel humain (dont le centre de Esalen était le porte-drapeau). En même temps, Jean-Michel était resté fidèle aux fondamentaux de la psychanalyse, ce qui explique l’évolution et l’aboutissement de sa carrière. Si la mienne a suivi une direction différente, elle est restée imprégnée des valeurs du potentiel humain, ce dont je lui suis pleinement redevable. Nous n’étions plus en contact depuis longtemps et, naturellement, son décès me fait le regretter et me touche beaucoup plus profondément que j’aurais pu l’imaginer !Bon voyage, mon cher Jean-Michel, sur cet autre versant de notre vie où nous nous rencontrerons peut-être et évoquerons alors les passionnants moments partagés !

Christian Maisons (H.66)

Je garde un souvenir très sympathique de Jean-Michel, qui faisait partie du comptoir espagnol première langue. C’était un camarade très ouvert, toujours en mouvement. Je le revois toujours aller et venir avec véhémence pour défendre ses idées avec vivacité (et talent !). Il portait déjà la barbe, dans un style très « rive gauche », et nous avions rarement les mêmes idées. Cela ne nous empêchait pas d’avoir des rapports chaleureux. Sa carrière a été un prolongement naturel et généreux de ses convictions. Malheureusement, nos vies professionnelles ont ététrès différentes et nous n’avons pas eu l’occasion de nous revoir.

Jacques Monbeig (H.66)

Jean-Michel était un ami cher et précieux. Une culture encyclopédique, une grande finesse, une curiosité de l’autre, un rire communicatif. Il a eu quelques moments professionnels et personnels délicats. J’ai essayé de l’aider. Dans une période difficile pour moi, il a été très présent. Depuis plusieurs années, nos routes s’étaient éloignées. Adieu l’ami.

Robert Bellaiche (H.66)

Je l’ai bien connu dans une époque déjà lointaine. C’était un esprit novateur qui à la sortie de l’école, s’est d’abord intéressé à l’édition et a occupé des fonctions de direction dans une maison d’édition. Il s’est ensuite tourné vers les thérapies comportementales et est parti se former en Californie avant de créer en France dans les années 1970 un centre appelé CDPH (Centre de développement du potentiel humain) où il assurait avec une équipe à la fois des formations et des thérapies. Par la suite, nous nous sommes perdus de vue. C’était un esprit curieux et il a beaucoup contribué au développement en France de la psychanalyse freudienne intégrative.

Maurice Nussenbaum (H.66)

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