Bernard Poissonnier nous a quittés le 15 avril 2019 dans sa 82°année. Je l’avais rencontré à Valenciennes en janvier 1971. Je venais alors de me faire embaucher à la Direction commerciale d’Usinor. Bernard était originaire d’Amiens où son père était médecin. Dès la fin de son service militaire en Algérie, il avait rejoint Usinor. En 1971, à l’âge de 33 ans, il était chef du département produits plats (tôles) tous marchés (le plus grand étant l’automobile).

Froid et distant de premier abord, il savait établir très vite une relation de confiance avec ses collaborateurs et ses correspondants extérieurs.Exigeant, rigoureux, d’une grande moralité, il ne supportait pas les écarts (rares) à son autorité, et était capable de grandes colères, quitte à s’excuser dans la demi-heure qui suivait. Un homme entier. Dans ce monde sidérurgique dominé alors par les techniciens, il était respecté et écouté par les ingénieurs d’usine, comme par l’ensemble des vendeurs.Célibataire endurci, on savait peu de choses de sa vie privée, sinon qu’il possédait une voiture de sport anglaise de couleur rouge… Il avait des convictions, comme la défense de la langue française. Il ne supportait pas les anglicismes.Il ne manquait pas d’esprit et d’humour, et avait le sens de la formule : « Directeur est un titre (qu’il n’avait pas à ses débuts). Chef est une qualité » ou « La réorganisation est comme la gymnastique corrective, si cela fait mal, c’est bon signe »…Bernard a connu au moins trois fusions successives qui l’ont conduit en fin de carrière au siège d’ArcelorMittal, à la Défense, toujours dans un poste d’état-major.Son plus grand mérite a été de former à la gouvernance de jeunes cadres commerciaux, dont un ou deux ont dépassé le maître dans les années 1990.S’il a facilité des carrières, lui-même n’était pas carriériste.

Trop rebelle, il refusait d’avoir une attitude de courtisan.J’ai gardé le contact avec lui jusqu’au début des années 1990. Je devais apprendre qu’il avait consacré sa retraite à enseigner la gestion à des jeunes. Son avis de décès paru dans Le Monde mentionne une invitation à faire des dons au profit de la fondation Apprentis d’Auteuil.Bernard, à ma connaissance, était peu impliqué dans le réseau associatif d’HEC, alors beaucoup moins structuré qu’aujourd’hui, mais il ne manquait pas une occasion de rappeler la mémoire de ses deux camarades de promo, Pierre Coulondre et Louis Percepied, morts sur le front en Algérie. Un camarade exemplaire.

Jean-Pierre Lombard (H.65)

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