Alain William Cole incarnait parfaitement l’audace et l’enthousiasme transmis par HEC dans les années 1950. Né dans le Jura, il passa les années de guerre à Londres, où son père d’origine britannique rejoint les services secrets MI6. L’offensive des nazis connue sous le nom de « Blitz » et le courage des Londoniens sous les bombardements, dans des abris creusés au fond des jardins l’ont beaucoup marqué. Il avait 9 ans lorsqu’il assista au discours du Général de Gaule au Royal Albert Hall.

Petit collégien en uniforme anglais, il servait fièrement de traducteur à sa mère chez les commerçants du quartier. Il choisit la nationalité britannique à sa majorité et garda comme trait de caractère l’humour anglais.

De retour en France, il intègre la prépa HEC au lycée Carnot et décide, un mois avant l’examen, d’aller réviser au grand air, sac au dos, sur les sommets jurassiens. Une idée bénéfique, puisqu’il fut admis brillamment dans la promotion 55.

C’est à cette époque qu’il rencontre sa femme à Saint-Germain-des-Prés au milieu d’un groupe

d’amis jurassiens dans l’ambiance turbulente des cabarets-théâtres et des nuits agitées au son du jazz.

Il débuta sa carrière de jeune « manager » à Saint Claude, pour une société anglaise Cadogan Investments France, appartenant au groupe Oppenheimer qui possédait plusieurs usines de pipes. Fort des conseils reçus de ses professeurs à HEC concernant l’importance de la communication événementielle, il fut cofondateur et président de la Confrérie des maîtres pipiers, conscient que cette industrie aurait du mal à perdurer et qu’il fallait absolument la faire connaître par le biais des médias.

En 1973, par goût de l’aventure, il accepta la mission de créer la filiale de Berthoud SA au Brésil, d’y fonder une usine de pulvérisateurs agricoles et de développer la marque. Il releva le défi, apprit le portugais et emmena sa famille à Curitiba dans l’état du Paranà. C’était encore l’époque des militaires, les lettres étaient ouvertes, les conversations des étrangers surveillées, la bureaucratie était pesante et l’inflation galopante.

Il arpentait l’intérieur du Brésil, les cultures de café, de coton, de soja, les fazendas immenses. Ses clients brésiliens étaient si fiers de lui montrer à cheval, chapeau de cow-boy sur la tête, leurs terres et leurs troupeaux. Il développa l’exportation au Paraguay, en Argentine, en Uruguay et au Venezuela.

Quelques années plus tard, son ami d’enfance Gérard Cottet (H.56), président d’Essilor, lui confia l’implantation de son usine de Manaus et la création d’un laboratoire de recherche à

São Paulo. Les bureaux d’Essilor étant situés à Rio de Janeiro, il s’y installa, prenant l’avion comme d’autres prenaient le métro.

Vers la fin de sa carrière, Alain William Cole reconnaissait avoir un talent de défricheur, de bâtisseur de projets, d’usines, mais avouait être moins passionné par la gestion quotidienne d’une entreprise.

Il fut président du Chapter HEC de Rio de Janeiro de nombreuses années. Fort de sa connaissance du Brésil, tant économique que sociologique, il fut le mentor des jeunes diplômés leur prodiguant de précieux conseils y compris celui de ne surtout pas être fiancé en France avant de venir faire un stage au Brésil, ce qui en fit rire plus d’un !

Il rejoint la France pour sa retraite, d’abord à Paris où il suivit des cours aux Beaux-Arts, ainsi qu’auprès d’un maître pastelliste, fréquentant l’atelier de la grande Chaumière, fier de sa carte de copiste du Louvre. C’était un peintre doué.

Il fut aussi un grand collectionneur d’art et de peinture populaire brésilienne, une exposition fut organisée au château de Gray.

Il s’installa ensuite à Dijon, appréciant la vie plus calme en province et la beauté de la capitale des Ducs de Bourgogne. Sa dernière passion fut l’art héraldique et les armoiries des chevaliers de l’Ordre de Toison d’Or. Sa vie fut un passionnant voyage…

Jicky S. Cole, sa fille

Published by