1939-1940 année soucieuse, année heureuse, les élèves poursuivent leur scolarité à Caen

Nous avons eu le privilège de pouvoir accéder aux archives de la commission d’enseignement d’HEC, et nous vous proposons de vous faire vivre à travers elles, l’entrée en guerre de l’école. Ce deuxième épisode évoque l’année passée à Caen, à travers des extraits des comptes rendus de la commission d’enseignement et l’interview de Stéphane Pavie, délégué de la promotion 1940, décédé depuis.

28 novembre 1939. Le directeur rend compte que 12 élèves mobilisés au titre du contingent 1939 ont quitté l’école.

12 janvier 1940. En vue du départ du deuxième contingent de la classe 1939, le directeur fait état des mesures qu’il a prises pour accélérer les cours. Les écrits auront lieu les 13, 14 et 15 juin à Alger, Bordeaux, Caen, Lyon, Marseille et Paris. Il fait savoir que l’enseignement de la défense passive, obligatoire, sera donné par les officiers instructeurs de la PMS.

9 février 1940. Le directeur fait savoir que le ministère de l’Éducation nationale a approuvé les mesures de bienveillance à l’égard des élèves appelés au titre du deuxième contingent de la classe 1939.

12 avril 1940. La chambre de commerce confie la direction de l’école à M. Burnier, en remplacement de M. Perrin, mobilisé. Le directeur rapporte que les bureaux de l’école sont installés dans l’hôtel Malherbe à Caen, et que les cours ont lieu dans la salle des fêtes de l’hôtel, à la chambre de commerce ou dans les locaux du lycée Malherbe.

13 août 1940. Le directeur informe que le concours d’admission prévu le 13, 14 et 15 juin 1940 a été ajourné, que les archives de l’école ont été transférées à Avranches ou laissées à Caen, que le personnel s’est retiré par ses propres moyens dans des destinations diverses.La commission examine ensuite les conditions de la remise en marche de l’école. La rentrée se fera à Paris et conformément à l’arrêté ministériel du 23 juillet 1939 la durée des études y sera de trois ans, un régime de transition sur deux ans étant prévu pour certains élèves placés dans des conditions spéciales.Le directeur propose à la commission les modalités exceptionnelles du concours d’admission dictées par les difficultés de la situation intérieure du pays.Le concours d’admission aura lieu en septembre. Des centres d’épreuves écrites seront organisés dans une quinzaine de villes avec la collaboration des préfets.Les inscriptions nouvelles seront reçues à Paris et à une adresse dans la zone non occupée.

Chaque candidat sera invité au moment de l’inscription à préciser s’il a été mobilisé ou évacué au cours de l’année écoulée.Des démarches seront effectuées auprès des autorités militaires pour obtenir que les candidats actuellement mobilisés soient en mesure de participer au concours.Les autorités compétentes seront consultées sur l’opportunité d’admettre des candidats étrangers.

Nous avons interviewé en 2014, avec Pierre Wertheimer, Stéphane Pavie, délégué de la promotion 1940, décédé depuis, qui nous a parlé de la vie à Caen (vous pourrez retrouver les films en ligne ainsi que des documents sur cette époque).La première année, nous étions 158 à Paris, où nous avons effectué notre scolarité normalement, et le 1er septembre 1939, la déclaration de guerre et la mobilisation générale ont appelé nombre de nos camarades sous les drapeaux. Nous n’étions plus que 85 à effectuer notre deuxième année à Caen avec les camarades de la promotion 1941.« L’école se transporte à Caen avec ses traditions, les cours en amphithéâtre où nous étions classés par rang d’entrée avaient lieu au réfectoire de l’hôtel Malherbe, ses comptoirs de l’après-midi au lycée Malherbe et à l’hôtel Escoffier, siège de la chambre de commerce, ses cahiers verts, sur lesquels nous devions écrire sur la page de droite les cours auxquels nous assistions. La page de gauche était réservée aux travaux personnels, avec des synoptiques, nous pouvions obtenir des “points de cahier” s’ils étaient bien tenus. »

« L’esprit potache, toujours présent, nous avons défilé dans les rues de Caen sur le thème de l’enterrement de la lettre de change, avec l’aval (grimé en Pierre Laval), le besoin affublé d’un bonnet de nuit et d’un pot de chambre, les petits porteurs avec leur valise sur l’épaule, devant les Caennais ébahis. »« Et pour l’organisation de la traditionnelle revue, qui se jouait d’ordinaire devant les parents et les élèves, et pastichait le corps professoral, le maire de Caen nous a offert le théâtre municipal, dans lequel nous avons donné deux représentations de sketches inspirés plutôt de l’actualité pour une meilleure compréhension. Pour notre 50e anniversaire nous sommes retournés à Caen avec la promo 1941. » Pour conclure, nous avions demandé à Stéphane quels mots il aurait souhaité dire aux étudiants d’aujourd’hui… « L’esprit de l’École est quelque chose de très fort, il est né entre beaucoup d’entre nous des relations très fortes, ce sont devenus de vrais amis. » À retrouver aussi en ligne l’intégralité de ces témoignages de l’esprit des étudiants.

A CAEN LE DÉPART (à la manière de Raymond Devos)
J’voulais entrer aux Hautes Études Commerciales.C’était en 40, J’arrive Boulevard Malesherbes et puis j’dis :
« Les Fisticis c’est ici ? »
Ben on m’dit : « Non »
Ah ben je dis : « Ça alors ! Depuis quand; c’est pas ici ? »
Ben il me dit : « C’est pas ici depuis Caen. »

CAEN DIRA-T-ON (à la manière de Jacques Prévert)
Rappelle-toi Fistici
il pleuvait sans cesse
sur Caen ces jours-là,
et ce fut par un froid de caennais
que l’Athènes normande
t’accueillit en ce sombre jour de novembre.

À suivre dans le prochain numéro : 1940-1941, retour dans un Paris occupé. Serge Cometti (H.86)

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