Comment une marque peut-elle survivre à son créateur ? Comment inventer le nouveau chapitre d’une Maison de mode ? Myriam Serrano, CEO de Maison Alaïa depuis 2019, répond à ces défis au quotidien. Après la disparition du grand Azzedine en 2017, la Maison qui appartient au groupe Richemont, attendait d’être redynamisée. Myriam Serrano a partagé quelques-unes de ses convictions avec le Club HEC alumni Luxe & Création, au cours d’un échange animé par Sylvie Ebel (H79), DGA de l’Institut Français de la Mode.

Dans la boutique de la rue de Marignan, Myriam Serrano porte haut et fort les couleurs de la Maison dont elle a repris les rênes. La nouvelle CEO de Maison Alaïa décrypte les collections de prêt-à-porter du directeur créatif, Pieter Mulier, sous-tendues par sa vision de la marque : une identité reconnaissable et une nouvelle énergie, pour sublimer les femmes et le pouvoir de la féminité. Ici s’écrit à quatre mains le futur de la maison. Ici se lisent les ingrédients d’un nouvel élan.

Azzedine Alaïa a marqué durablement la mode. Internationalement connu, il nourrissait une relation très humaine avec ses clientes fidèles, comme avec tous ses collaborateurs : sa « famille ». D’où la difficulté de la relève : comment passer le relais créatif sans perdre l’esprit de la marque… « La 1ère option, explique Myriam, aurait été de poursuivre avec le studio de création historique, les « mains d’Alaïa » : le studio pouvait continuer de créer comme Azzedine ». La 2ème option, c’était de nommer un nouveau directeur créatif. La CEO s’est attachée à écouter toutes celles et ceux qui ont travaillé avec le Maître. « Chaque personne que je rencontrais avait un lien personnel avec Azzedine ». Myriam Serrano se forge rapidement une conviction : le futur d’Alaïa, c’est de tourner la marque vers l’avenir. Après avoir rencontré une trentaine de créateurs, en 2021 le choix de Pieter Mulier s’impose : ensemble ils vont incarner et renouveler le style de la Maison. Myriam et Pieter échangent ensemble sur les marqueurs du style Alaïa : l’héritage tunisien, la résille évoquant les moucharabieh, le travail du cuir, du denim, la transparence, les couleurs noir et blanc, le nude, la taille cintrée, le cœur… Et Pieter ensuite insuffle son énergie et sa vision créative : « Beauty beyond fashion ». La première collection est un succès. Adhésion de la presse et des clientes. Premier chapitre réussi.

Myriam Serrano avoue que « chaque jour est un roman, tout est à écrire ». Elle s’est engagée dans l’aventure en 2019, avec le soutien du groupe Richemont qui a acquis la marque en 2007. Diplômée d’HEC (2001) puis de l’IFM (2002), Myriam a officié chez Céline, Nina Ricci et Chloé. Lorsqu’elle rejoint la Maison Alaïa, elle sait que l’enjeu est important : porter la responsabilité de la continuité d’une Maison… Un type de challenge qu’on ne rencontre pas souvent dans une carrière. Myriam décide de « ne pas se stresser », pour gérer la pression et réussir. Avec une équipe soudée, un début prometteur, la CEO de la Maison Alaïa est confiante. Ses prochaines étapes : « grandir ». Les axes de développement concernent plusieurs domaines : toucher la jeune génération, déployer la maroquinerie, développer les marchés sur lesquels la marque est appréciée (ouverture de la 1ère boutique à New York, 50% de la clientèle Alaïa étant américaine). Et surtout, développer la marque sur les marchés Asie et Moyen-Orient. La stratégie de Myriam Serrano est d’abord d’éduquer sur la marque et sur les produits iconiques de la Maison. Ensuite ? Ce sera le tour des bijoux, d’un parfum, et – pourquoi pas – des objets pour la maison. Myriam Serrano voit loin.

crédit photo@Paul Schmidt

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