Le mot de Zoé Henninger (H.22)
Décembre 2019. Le Covid 19 n’est encore qu’une rumeur, et avec Manon, Sophie et Élisabeth, trois amies ingénieures, nous nous prenons à rêver de contrées lointaines : Afrique du Sud, Argentine, Australie… Les lointaines contrées du Nouveau Monde du vin, passion qui nous rassemble toutes les quatre. Quelques semaines plus tard, ce rêve a un nom : Worldwine Women, et prend la forme d’un projet autour de la viticulture durable. Notre idée est simple : étudier la façon dont ces pays font face à des effets du changement climatique bien plus prononcés qu’en France aujourd’hui, pour que nous puissions inspirer les vignerons à notre retour, via un rapport scientifique et un film documentaire de sensibilisation.Une pandémie mondiale et neuf mois plus tard, nous mettons au monde un projet bien différent de ce que nous avions imaginé : nous ne partons plus dans le monde mais en Europe, nous ne prendrons pas l’avion mais les petites routes, accompagnées de notre fidèle Betty, pour une aventure qui tient désormais bien plus du voyage initiatique que de l’escapade touristique ou scientifique. L’humain est au cœur de nos préoccupations : notre étude est sociologique et porte sur la conscience écologique ; notre documentaire dressera les portraits des vigneronnes d’aujourd’hui, autant de rencontres que d’exemples de vie. Nous nous filmons tout au long de notre aventure, car nous souhaitons que ce documentaire soit un témoignage sur la façon dont quatre jeunes filles de 22 ans mûrissent au gré des rencontres et des aléas du voyage tout en étant confinées dans 4 mètres cubes, par choix, pendant quatre mois.
Après deux mois de voyage, j’ai déjà beaucoup grandi. Apprendre l’histoire dans les livres et les journaux m’a toujours intéressée, mais c’est sans comparaison avec le témoignage vivant d’un vigneron macédonien qui a grandi sous Tito. Tomber en panne d’essence sur le bord de l’autoroute, c’est marrant. Rester bloquées quatre jours au garage sans aucune garantie de résultat ni de fourchette de prix et voir tous ses plans s’envoler, c’est autre chose. Voyager, bouger sans cesse, être sans cesse confronté aux imprévus, qu’ils soient mécaniques, logistiques, légaux, diplomatiques, sanitaires, familiaux ou amoureux, c’est épuisant moralement. Et pourtant, puisque c’est notre choix et aussi puisque nous n’avons plus le choix, chacune puise en elle et même les situations les plus désespérées deviennent hilarantes. Le seul sujet de disputes, aujourd’hui encore, reste la coinche – était-il raisonnable de prendre à 100 sans Valet et Neuf mais avec Belote Rebelote ?Si je souhaite partager ce projet, c’est parce que je pense qu’en ces temps difficiles, il est la preuve que tout est possible. Oui, quatre filles peuvent prendre un van pour la Géorgie en pleine pandémie, remettre de l’huile dans le moteur quand il le faut et survivre sans lisseur (et souvent sans douche pendant plusieurs jours). Mais surtout, c’est une aventure qui peut permettre à chacun de s’évader de sa quarantaine, car nous partageons nos aventures tous les jours sur notre compte Instagram, @worldwine_women, en attendant la projection de notre film, dont la post-production sera réalisée par une équipe professionnelle que nous avons déjà recrutée !
Published by La rédaction