Pour l’innovation inclusive dans le contexte des handicaps
Le terme social est profondément ancré en moi comme une évidence. Je suis particulièrement sensible à autrui et à ses difficultés. Bien que de nature empathique, j’éprouve également un désir marqué de créer et de concevoir des solutions adaptées aux besoins des populations marginalisées, discriminées, exclues. Par ailleurs, le terme innovation émerge comme une conviction intime, une intuition profonde.
En somme, ce qui guide mon parcours depuis mon entrée dans l’âge adulte pourrait être défini par le concept d’innovation sociale. Ce concept semble constituer un fil conducteur entre mes diverses recherches menées au cours de ma carrière académique, qui s’étend sur plus d’une dizaine d’années. Paradoxalement, jusqu’à récemment, je n’avais pas exploré ce concept de manière approfondie : ni lecture systématique, ni étude détaillée n’avait été entreprise à son sujet. Désormais, ce concept s’impose à moi comme une quasi-certitude, un objet à explorer, à analyser, à déconstruire et à mettre à l’épreuve. Est-il possible que ce concept soit si intégré dans le langage commun qu’il suscite une impression trompeuse de familiarité, voire de maîtrise implicite ?
À bien y réfléchir, en examinant mes travaux et mes expériences dans le champ de l’entrepreneuriat social, il apparaît que le concept d’innovation sociale constitue un cadre d’analyse englobant et pertinent. Il transcende la seule création ou reprise d’entreprise pour intégrer des dimensions plus larges, notamment celles relatives aux organisations et à leur capacité d’innovation à caractère social. Ce concept ouvre ainsi la voie à une réflexion sur la place de l’innovation sociale dans les dynamiques organisationnelles. Cette interrogation semble cruciale, tant sur le plan intellectuel que dans une perspective d’action publique.
Je ressens un enthousiasme et une curiosité renouvelés à l’idée de découvrir la littérature consacrée à l’innovation, et plus particulièrement à l’innovation sociale, dans le domaine des sciences de gestion. Cette quête de savoir, empreinte d’un désir d’interdisciplinarité, me pousse à explorer des disciplines connexes, telles que la science politique ou la géographie. Ces champs disciplinaires offrent des perspectives nouvelles et permettent une compréhension plus globale et nuancée de l’objet d’étude. En effet, la recherche en sciences sociales, par sa nature fédératrice, produit des connaissances qui éclairent et enrichissent les débats autour de l’innovation sociale. Ainsi, comment les sciences sociales appréhendent-elles cette forme particulière d’innovation ? Comment l’innovation inclusive s’inscrit-elle dans le prolongement de l’innovation sociale ?
Mon ouvrage intitulé Handicaps, de l’innovation sociale à l’innovation inclusive s’inscrit comme une réponse à cette question. Il ambitionne d’offrir une perspective différente sur l’entrepreneuriat et l’innovation, en interrogeant ces thématiques sous l’angle des handicaps. Il repose sur une volonté affirmée de contribuer à l’action publique. Il s’attache à analyser l’innovation inclusive en prenant pour prisme les expériences vécues par les personnes en situation de handicap ainsi que les pratiques des organisations qui les accompagnent. Il a comme objectif de contribuer à l’enrichissement des connaissances sur l’innovation inclusive et de favoriser l’émergence de solutions novatrices en faveur de l’inclusion sociale, professionnelle et entrepreneuriale.
Enfin, il entend fournir des analyses, des outils, des recommandations aux décideurs politiques, aux acteurs associatifs et aux dirigeants d’entreprise pour concevoir, accompagner des actions, des politiques économiques et sociales en phase avec les réalités vécues par les personnes en situation de handicap.
Julien Billion (E.17)
Published by La rédaction