L’Entrepreneure de la semaine : Karen Contet (M.05), agent double de la fintech
Pour les 50 ans de la mixité à HEC, la rédaction met les femmes à l’honneur !
Voilà une dizaine d’années que Karen Contet (M.05), la cofondatrice de la Hong Kong Fintech Week, grand-messe mondiale de la tech, agite la Silicon Valley asiatique. Entretien avec cette passionnée de nouveaux mondes.
Le jeu vidéo qu’elle préférait lorsqu’elle était adolescente ? Mario Kart ! Née à Versailles, Karen Contet passe son enfance au Japon. Sa famille s’y expatrie en 1985 alors que son père est chargé de monter un bureau de liaison pour le groupe Renault à Tokyo. Elle vivra dans la capitale nippone jusqu’à ses treize ans, marquée par l’univers futuriste du gaming.
Fan de maths, passionnée de technologie, Karen Contet étudie l’ingénierie informatique entre la France et le Canada. Pas de doute, elle sera trader, et s’en donne les moyens en passant un Master en finance internationale à HEC. En 2005, elle commence sa carrière chez JP Morgan à Tokyo, au cœur de la computer science et de l’actualité financière et se spécialise dans les produits dit « exotiques ». « Ça me correspondait vraiment très bien. C’était intense, mais c’était vraiment génial. Maintenant, je bosse toujours quinze heures par jour, mais à mon compte », plaisante-t-elle.
À l’époque, quand quelqu’un arrivait à lever 500 000 dollars, c’était une rock star !
En 2010, Karen Contet bifurque direction Hong Kong, où beaucoup de banques ont déménagé après la crise financière de 2008. Inspirée par le fourmillement entrepreneurial de la ville, la tradeuse prend la décision de reprendre les études pour apprendre à coder son site et monte, en 2014, la société WHub avec sa meilleure amie l’entrepreneuse allemande Karena Belin. Les deux acolytes lancent leur plateforme pour référencer les boîtes, leur donner de la visibilité tout en aidant à mettre en avant une mission plutôt qu’un produit ou un service.
« C’était vraiment au début de l’écosystème tech, explique la cofondatrice. On était fascinées par les entrepreneurs et le fait qu’ils pouvaient parler de leur start-up pendant des heures. » Le W de Whub fut d’ailleurs soigneusement choisi en référence au livre Start with Why de l’auteur et conférencier Simon Sinek.
Annuaire des start-up, offres d’emploi, job fairs, hackathons et autres événements thématiques… Très vite, Karen Contet créé des liens entre les boîtes, les talents et les investisseurs. La communauté WHub agite ainsi la tech l’Asie du Sud-Est à une époque où les mots fintech, levée de fonds ou unicorn ne sont pas encore passés dans le jargon business.
« Le mot start-up ne faisait pas partie des mentions du gouvernement dans leur budget annuel, se rappelle-t-elle. Quand quelqu’un arrivait à lever 500 000 dollars, c’était une rock star. » Cet engouement pour le milieu mène à la création de la Fintech Association en 2017 pour « collaborer et avoir plus de poids auprès des régulateurs. »
20 millions de dollars d’investissements
Œuvrant au passage pour l’entraide des femmes de l’IT avec l’association Women Who Code, elle tente de pousser un milieu qui reste majoritairement masculin vers plus de diversité. Karen Contet est aussi aux manettes de AngelHub, un organisme homologué par la SFC (Securities and Future Commission), le régulateur du marché hongkongais, et qui permet aux professionnels de créer leur propre portefeuille de start-up.
Son application Club Deal propose, elle, de se syndiquer en réseau privé, en famille ou entre amis, autour de projets d’investissement. « Put your money where your passion is, c’est vraiment ça le but, ajoute-t-elle. C’est génial d’être à l’avant-garde et de voir toutes les nouvelles technologies se développer. » Avec AngelHub, cette ambassadrice naturelle de la fintech en France et en Asie soutient actuellement 24 sociétés pour 20 millions de dollars d’investissements.
Un développement en Europe ?
Karen Contet organise surtout l’une des plus grosses conférences tech au monde : la Hong Kong Fintech Week, qui a réuni 800 speakers et 35 000 visiteurs en deux jours cette année. « Les conférences servent à renforcer le networking et l’éducation à la tech. Le partage de l’information est la clé », rappelle-t-elle. L’ordre du jour ? L’intelligence artificielle, le Web3, les cryptomonnaies, la blockchain… On devine, en échangeant avec l’entrepreneure, un émerveillement sur ces sujets. « Les possibilités sont vraiment incroyables. On peut maintenant détenir une partie du web ou acheter des éléments d’un jeu vidéo ! »
Et maintenant ? La « reine de la tech » vient de planter son drapeau en Europe… Déjà occupée à lancer des fonds d’investissement, elle voudrait y développer AngelHub, sa plateforme de crowdfunding entre investisseurs et start-up, tout en continuant de jouer les ambassadrices business entre Paris et Hong Kong.
Published by Estel Plagué