Le mot de Jean-Pierre Rastier (H.59)
Rien ne me destinait à entrer directement au cœur du monde industriel en usine et je pense avoir été le seul de notre promo à m’engager dans cette voie.Tout commence en 1957 par un stage d’été de deux mois au siège parisien rue Balzac de la compagnie Pechiney (3e producteur mondial d’aluminium), puis des contacts suivis tout au long des deux dernières années à Malesherbes, sans oublier des relances en Algérie. C’est ainsi qu’en mars 1962, je me suis retrouvé, débarquant des djebels et encore marqué par cette période difficile, dans une petite ville de 2000 habitants dans les hautes Alpes, à l’Argentière-la-Bessée, où Pechiney avait établi à proximité de l’usine d’aluminium son centre de formation pour agents de maîtrise destinés à œuvrer dans le monde entier.
Je me revois encore, car ce sont des images fortes, débarquant du train Paris-Briancon avec arrêt dans cette petite gare devant les portes de l’usine, sous la neige, avec ce mélange irréel de ciel bleu, de mélèzes et cette odeur si caractéristique de carbone.C’est ainsi que je suis entré dans le monde industriel, royaume des ingénieurs tout étonnés d’ailleurs pour certains de voir que j’étais parfaitement à l’aise de comprendre les procédés de fabrication et capable d’équilibrer des équations chimiques. Dès mon arrivée, j’ai été plongé dans le bain, en commençant par trois mois de travail en postes continus comme ouvrier et agent de maîtrise avant de prendre la direction de l’école de formation dénommée « centre du Fournel ».
La suite est une longue aventure passionnante qui va durer presque quarante ans à Pechiney dont douze années en usines en France et à l’étranger avec des responsabilités variées et croissantes qui m’ont conduit à assurer en fin de carrière la direction de la communication du groupe (senior vice-président communications). J’ai l’intime conviction que je ne serais jamais arrivé à ce niveau de responsabilité si je n’avais pas connu la vie d’usine, avec la richesse qu’elle apporte sur le plan des relations humaines et de la crédibilité vis-à-vis des équipes opérationnelles qui œuvrent sur le terrain. C’est fondamental en termes de communication, car le meilleur vecteur des messages externes est celui porté par l’interne. Je souhaite à beaucoup de nos diplômés de ne pas hésiter (et certains l’ont fait depuis avec brio et notoriété) à s’engager dans le monde de l’industrie, où ils ont beaucoup à apprendre et à apporter.
Published by Marielle Chabry