Vous utilisez, en ce moment, l’intelligence artificielle. Elle a amélioré vos résultats de recherche, elle optimise votre batterie, et elle analyse vos cookies de navigation pour vous présenter des publicités personnalisées. Non seulement l’I.A. est omniprésente dans notre quotidien, mais elle est le plus souvent invisible.

 

En enseignant l’électif ARTificial à HEC, et en écrivant Fantasia (Grasset, 2024), j’ai voulu la montrer. Ni manuel tech, ni essai d’opinion, Fantasia est un recueil d’histoires, qui montre la diversité des I.A., met en lumière leurs enjeux, et porte à réfléchir sur le rôle de l’homme, du travail, de la création face aux technologies d’apprentissage automatisé.

Lorsque j’étudiais à HEC, ma thèse professionnelle portait sur les mécanismes de recommandation en littérature : comment savoir qu’un livre plaira à quelqu’un, alors que chaque livre, et chaque personne, est unique ? Les méthodes existantes me semblaient trop limitées. Demander à quelqu’un « qu’aimeriez-vous lire ? » revient à nier le plaisir de la découverte, et recommander un livre « parce que les acheteurs de Molière ont aussi acheté du Corneille » est biaisé. C’est alors que je me suis intéressée au matching par IA, et à sa formidable capacité de mise en relation d’ensembles de données similaires.

J’étais fascinée par X degrees of separation, une oeuvre numérique qui organisait 7 millions d’oeuvres visuelles comme j’aurais aimé organiser des bibliothèques : par similarité. Elle avait été développée par l’artiste Quasimondo, lors d’une résidence à Google Arts & Culture. J’ai rejoint le centre de recherches de ce département de Google dédié à la numérisation et à la démocratisation des chefs-d’oeuvre, et j’y ai découvert l’intelligence artificielle en train de se faire, par la pratique, en travaillant avec les creative coders.

J’ai voulu partager cette expérience avec les étudiants d’HEC. Dès 2018, le cours ARTificial illustrait les grands concepts de l’I.A. à partir de bases de données visuelles ou musicales. Les interventions de creative coders ou d’artistes ont permis d’aborder les enjeux de ces technologies : biais, impact sur la propriété intellectuelle, sur le travail, confidentialité des données, enjeux de la modération…

Il m’a semblé qu’un des aspects les plus frappants de la société contemporaine était l’explosion de la data. Nous produisons de plus en plus de textes, de messages, d’images. Et nous les stockons de mieux en mieux. De là, l’amélioration des I.A. statistiques, mais aussi ses dérives : désinformation, profilage, radicalisation, manipulation, et jusqu’à la naissance de nouveaux caractères, propres à notre époque, incapables de choisir devant une telle orgie de possibilités.

Fantasia donne à voir ces mécanismes dont nous vivons tous les conséquences. Ce sont des récits, fables, dialogues, brèves, qui racontent l’I.A. par la pratique, montrent ses différentes facettes, et mettent en lumière leur influence dans notre quotidien. Il se pourrait même qu’on y croise Peter Todd, au détour d’un chapitre sur les deepfakes… Ces histoires se partagent en trois thèmes : ce qu’est l’I.A. et ce qu’elle n’est pas ; ce qu’elle change et ce qu’elle ne peut pas changer ; les promesses de l’I.A. et celles qu’elle ne pourra pas tenir.

Le livre est disponible sur le site des Éditions Grasset.

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