Jean Cassegrain, PDG de Longchamp, répond aux HEC
Son sac iconique a été porté par Kate Moss, Madonna, Claudia Schiffer ou plus récemment Kendall Jenner, de la fratrie Kardashian. La maison Longchamp s’est fait un nom grâce au « Pliage », sac iconique en nylon et en cuir inspiré de l’origami. Son design minimaliste fait fureur en Europe, en Asie et jusqu’en Amérique. Tout avait commencé, il y a soixante-quatorze ans, par une affaire familiale de pipes en bois dotées de gaines en cuir. Elles connurent un beau succès au lendemain de la Seconde Guerre mondiale auprès des militaires américains postés à Paris. Le fondateur de Longchamp, Jean Cassegrain, grand-père (et homonyme) de l’actuel PDG, décide ensuite de diversifier l’offre en créant des produits de maroquinerie pour homme. À son décès en 1972, son fils Philippe reprend les rênes.
C’est lui qui donnera à la marque une autre dimension en inventant cette même année le sac « Pliage ». Plus de 30 millions d’unités ont été vendues dans le monde depuis sa création, selon le magazine Challenges. Philippe meurt en novembre 2020. Le petit-fils Jean prend alors le relais. Sa sœur Sophie Delafontaine, directrice artistique, complète le tableau d’une belle saga familiale. Avec 1,9 milliard d’euros en poche, la famille Cassegrain se classe 64e fortune de France d’après le classement 2022 de Challenges. En juillet, Bonnie Basei (M.23), Tanguy Le Berre (H.24) et Emy Saïz (H.25) ont rencontré Jean Cassegrain au siège de Longchamp, dans le showroom presse où était présentée la collection automne-hiver 2022-2023. Avec dynamisme et sans complaisance, les trois étudiants ont interrogé le petit-fils du fondateur, actuel PDG de Longchamp, sur la stratégie de cette pépite de la maroquinerie à la française et sur son plan d’action sociétal. Quitte à bousculer, mais avec tact, une maison connue pour sa discrétion.
Une référence de la maroquinerie française
Emy Saïz (H.25): Pourquoi vos clientes s’achètent-elles un sac Longchamp plutôt qu’un sac Coach, Furla ou Lancel ?
Jean Cassegrain: Notre marque a su gagner la confiance de nombreuses femmes, françaises et étrangères. Nous avons beaucoup travaillé la « désirabilité » de notre marque et de nos produits. L’objectif, c’est de donner envie aux clientes de se projeter dans leur vie future avec leur nouveau sac.
Tanguy Le Berre (H.24): Quand on évoque Longchamp, je pense immédiatement au sac «Pliage » qui est très populaire chez les jeunes. Mais je vois en tapant Longchamp sur Google que vous vous décrivez comme une marque de luxe. Le luxe ne se justifie-t-il pas par sa rareté ?
J.C.: Le « Pliage » est une espèce d’ovni. Il n’est pas seulement porté par les jeunes mais par tout le monde : votre mère mais aussi votre grand-mère en ont peut-être un. C’est un produit intergénérationnel, ce qui est très rare en marketing. Le MBA de Harvard en a même fait une étude de cas.
Tanguy: C’est un peu comme le Nutella dans l’alimentation? Il n’y a pas d’âge pour en porter ?
J.C.: Voilà, pas d’âge ni de classe sociale, on retrouve le sac « Pliage » partout. Les règles habituelles ne s’appliquent pas vraiment à ce produit.
Tanguy: Pourquoi est-il aussi universel ?
J.C.: Sa grande force est d’être à la fois très simple et très original. Il est unique et reconnaissable. Une véritable prouesse ! Pour un designer, il est plus facile de créer quelque chose de compliqué que simple…
Bonnie Basei (M.23): Longchamp associe son image de marque à ses origines parisiennes, bien que l’entreprise ait également une longue histoire avec les États-Unis. Le modèle du luxe à la française a-t-il encore de la valeur en 2022 ?
J.C.: Nos produits mettent en valeur l’image de la femme parisienne. Pour certaines marques tricolores, les Français ne représentent plus qu’une petite part de la clientèle. Ce n’est pas le cas pour Longchamp. Si vous êtes chinoise, américaine ou japonaise, s’identifier à la femme parisienne est assez motivant. De nombreux livres traduits dans le monde entier évoquent son élégance. Il y a une espèce de mythe de la Parisienne qui repose sur son élégance spontanée. Elle donne l’impression d’avoir pris dans son placard le premier vêtement venu, pour un rendu parfait… alors qu’il y a tout un travail derrière qui ne doit surtout pas se voir.
Tanguy: Allez-vous vous lancer dans la seconde main ?
J.C.: À ce stade, la revente est une activité majoritairement C to C – d’un client à un autre client, sur Vinted ou autre. Un particulier prend en photo son sac avec son téléphone, puis met en ligne une annonce. Si nous faisons de la seconde main, nous le ferons à un niveau d’exigence plus élevé. Je ne vois pas très bien quelle valeur ajoutée nous pourrions apporter. Si vous regardez les marques qui ont introduit sur leur site internet, ou parfois en boutique, la vente de produits de seconde main, les volumes sont très symboliques. Cela relève avant tout de la communication. Les vrais volumes se font sur les sites de revente C to C.
Tanguy: Longchamp est une affaire de famille. Comment perpétuer la vision de votre grand-père dans un monde en constante évolution, qui fait face au risque climatique ?
J.C.: C’est une question quasi philosophique ! (rires) Notre entreprise va bientôt fêter ses 75 ans. Le secret de notre longévité est d’avoir su distinguer ce qui relève des valeurs fondamentales, intrinsèques à Longchamp, et celles qui doivent évoluer. Notre activité a commencé par des pipes gainées de cuir. Aujourd’hui, le showroom compte des vêtements, des sacs ou encore des chaussures. Initialement, la clientèle était exclusivement masculine. Désormais, elle est composée à 80 % de femmes. L’entreprise a su se renouveler tout en préservant son identité. Le cuir, par exemple, a été au cœur de notre activité dès le premier jour puisque les fameuses pipes étaient gainées de cuir. L’amour du cuir est ancré dans notre maison.
Tanguy: Quelles sont vos autres valeurs « historiques » ?
J.C.: Je commencerai par l’ouverture sur le monde. Dans son magasin, mon grand-père vendait à des visiteurs étrangers, notamment les troupes alliées présentes en France après la guerre, des Américains, des Anglais et des Australiens. Dès les années 1950, il voyageait dans le monde entier pour prospecter. Mon père a fait de même. J’ajouterai ensuite les valeurs de qualité, authenticité, sincérité. La famille Cassegrain est garante du maintien de ces valeurs. Ce qui ne nous empêche pas de nous adapter. La vente en ligne prend une proportion croissante dans le chiffre d’affaires. En définitive, les modalités changent, mais pas nos convictions profondes.
Tanguy: Le bouleversement des chaînes d’approvisionnement a provoqué une pénurie de matières premières, dont le cuir. Comment vous adaptez-vous ?
J.C.: En tant qu’entreprise internationale, nous transportons de nombreux produits depuis les lieux de fabrication vers les lieux de vente. Nous travaillons en ce moment à régionaliser nos productions en trois zones : l’Europe, l’Asie et l’Amérique du Nord. Cela nous permet de réduire notre impact climatique mais aussi nos délais et nos coûts de transport.
Bonnie: Quand j’ai demandé à mon entourage ce que lui inspirait Longchamp, il m’a uniquement parlé du sac «Pliage ». Avez-vous un projet disruptif qui pourrait bousculer votre image de marque ?
J.C.: Le « Pliage » occupe une place assez unique dans l’univers du sac. Notre slogan l’exprime bien : « Ceci n’est pas un sac, c’est “Le Pliage” ». Ce produit n’a pas vraiment de concurrents. Il est très difficile de créer des produits aussi uniques, qui deviennent à la fois mythiques et emblématiques d’une marque. Beaucoup d’entreprises aimeraient en avoir un dans leur portefeuille. Deux, c’est encore plus rare.
Bonnie: Quid de la diversification ?
Jean Cassegrain: Je crois que la bataille n’est pas de créer un autre produit aussi mythique que « Le Pliage ». Il s’agit plutôt de faire connaître la marque dans le monde, au-delà du « Pliage ». En France, la marque est assez bien connue des consommateurs. Mais il est vrai qu’à l’étranger, la marque s’est développée et appuyée dès l’origine sur le succès du « Pliage ». Dans ces pays, il est important que nous fassions connaître nos autres produits. C’est en train de se produire dans de nombreux pays. En Chine, par exemple, « Le Pliage » occupe une place relativement modeste dans les ventes.
Faire connaître la marque dans le monde audelà du Pliage
Bonnie: Les Français savent-ils vraiment que vous produisez autre chose que des sacs ?
J.C.: Sur le prêt-à-porter et les souliers, je pense que la sauce commence à prendre. Le travail que nous avons fait sur les collections commence à se voir. Je citerai également les lunettes. Depuis quatre ou cinq ans, notre collection de lunettes est diffusée en boutique et chez les opticiens. Sa visibilité a beaucoup augmenté.
Emy: Vous l’avez dit, Longchamp possède une signature très française, et s’assume parisienne. Mais comment parvenezvous à pénétrer des marchés étrangers aux cultures très différentes? Je pense à l’Asie ou au Moyen-Orient.
J.C.: C’est un travail de longue haleine. Les premiers voyages au Japon de mon grand-père remontent aux années 1950. Nous avons été parmi les premières marques européennes à s’implanter dans l’archipel. Je pense que notre marque repose sur une certaine authenticité, et sur la qualité de ses produits. Notre succès n’est pas basé sur un buzz éphémère, il s’est construit sur le temps long. Votre question renvoie à l’équilibre entre international et local. Faut-il adapter les produits et les communications à chaque pays ? Oui, mais à la marge. Si des Japonais ou des Chinois s’intéressent à notre marque, c’est parce que l’image de la femme parisienne les attire et les séduit. Ce serait contre-productif de trop s’adapter. Nous le faisons au cas par cas.
Emy: Par exemple ?
J.C.: Les femmes américaines aiment les sacs plutôt grands tandis que les Asiatiques les préfèrent petits. En outre, nous nous efforçons de montrer une grande diversité de visages dans la communication pour que chacun puisse s’y retrouver et s’identifier.
La responsabilité sociétale du groupe
Bonnie: Vous parlez des visages. Les égéries iconiques de Longchamp, Kate Moss et Kendall Jenner, sont particulièrement représentatives des critères de beauté imposés par la mode et les médias…
J.C.: Kate Moss pourrait presque être qualifiée de Parisienne honoraire. Elle a cette attitude décontractée chic qui la caractérise. C’est peut-être moins vrai pour Kendall, qui est très californienne. Cela étant, vous faites là référence à des communications qui sont assez anciennes
Bonnie: Pourriez-vous inclure plus de diversité dans les critères de beauté de vos égéries?
J.C.: On peut avoir une attitude parisienne en étant chinoise, marocaine ou malaisienne.
Tanguy: En France, Longchamp compte six sites de production détenteurs, dites-vous, d’une expertise rare. Comment faites-vous pour conserver ce savoir-faire malgré la pénurie de main-d’œuvre ?
Jean Cassegrain: Effectivement, le recrutement n’est pas une mince affaire. Nous devons remplacer les départs en retraite et nous voulons en plus développer nos capacités de production en France. Pour cela, il faut aller dans les écoles, nous faire connaître comme un employeur attractif. Je crois que la perception des métiers artisanaux a tout de même évolué. Beaucoup de nos salariés sont contents d’avoir un « vrai » métier, de fabriquer quelque chose de leurs propres mains. C’est à nous de faire en sorte que les gens soient contents de venir travailler chez nous.
Tanguy: D’où votre école Longchamp
J.C.: Il est quasiment impossible de recruter des gens déjà formés à la maroquinerie. Les besoins sont trop faibles pour un pays de la taille de la France. C’est pourquoi nous avons lancé notre propre structure de formation. Nous recrutons sur la base de tests de motivation et d’habileté manuelle, puis nous formons les jeunes recrues dans nos ateliers.
Bonnie: En 2018, le Fashion Transparency Index, qui jauge les politiques RSE et la traçabilité des plus grandes marques de mode, a attribué la note minimale de 0 à Longchamp. Avez-vous mis en place une stratégie spécifique pour remédier à ce problème de transparence ?
J.C.: Je n’accorde pas beaucoup de crédit à ce type de classements. À ma connaissance, aucun n’est basé sur des audits sérieux des entreprises en question. Sans commenter en particulier celui que vous évoquez, mon impression est que ces classements se basent uniquement sur ce qui est publié sur les sites web des entreprises. Par exemple, si vous ne précisez pas sur votre site que vous ne faites pas travailler d’enfants, vous perdez des points. Alors que, pour nous, c’est une évidence ! Les classements ne jugent que l’effort de transparence, mais pas du tout la réalité derrière les mots. Nous sommes une entreprise privée et familiale plutôt discrète. Nous ne publions pas énormément d’informations. Je reconnais qu’aujourd’hui, la transparence est considérée en elle-même comme une vertu. Nous avons sans doute des progrès à faire dans ce domaine. Mais de nombreuses marques sont à mon avis très imprudentes dans leur communication RSE. Les mots engagent. Nous parlions tout à l’heure des réparations. Avant, nous ne communiquions pas du tout sur ce sujet. Nous commençons à le mettre en avant. Le public a envie de connaître l’entreprise qui est derrière la marque.
Bonnie: Ça ne coûte pas grand-chose de dire que vous ne faites pas travailler des enfants…
J.C.: Il y a un moment où on peut penser que cela va de soi. Encore une fois, je pense que notre job de marque est de mériter la confiance des clients. Ma mission, c’est de faire en sorte que la maison puisse être fière de tout ce qu’elle fait et qu’elle se sente à l’aise avec ses pratiques dans le monde entier. Nous sommes en train de faire notre transition sur le sujet de la communication, mais nous n’allons pas céder au diktat de la transparence.
Bonnie: Les initiatives prises par Longchamp pour l’environnement ont principalement vocation à limiter l’impact de ses activités, en réduisant par exemple les émissions de gaz à effet de serre liées au transport de marchandises. Mais avez-vous pris des initiatives qui permettraient d’avoir un impact positif sur la société et l’environnement ?
J.C.: Même si cela paraît peut-être un peu démodé ou ennuyeux, notre principal impact positif est de fabriquer des produits de qualité, qui vont durer longtemps. J’ajoute que nos conditions de travail sont propices à l’épanouissement de nos salariés. Nous employons 300 personnes dans notre atelier de Tunis, en Tunisie. Ce sont essentiellement des femmes. Nous sommes implantés dans ce pays depuis bientôt trente ans. Pendant la Révolution de jasmin en 2011, des entreprises ont quitté le pays. Nous sommes restés. Tout cela a peut-être besoin d’être mieux « packagé » et communiqué mais je pense que oui, nous avons apporté des choses positives à la société depuis soixante-dix ans. Encore une fois, nous ne sommes pas dans une approche de greenwashing ou de « RSE-washing ». Nous sommes en train de formaliser une politique RSE qui va nous permettre de mieux exprimer tout ce que je viens de vous dire de façon un peu maladroite.
Emy: De plus en plus de marques utilisent du simili cuir végétal. Veja, par exemple. L’innovation s’accélère dans ce domaine, y compris dans des start-up françaises comme La Tannerie végétale. Que pensez-vous de ce matériau, et pouvons-nous attendre une gamme vegan chez Longchamp ?
J.C.: Je vous remercie d’avoir utilisé l’expression « simili cuir » parce que le cuir vegan, ça n’existe pas ! Si c’est vegan, ce n’est pas du cuir… Ce qu’on appelle à tort « cuir vegan », c’est du sky ou du PVC. Le pétrole, c’est vegan, mais ça n’est pas du cuir ! Soyons honnêtes, il n’existe pas de matériaux ayant les propriétés du cuir. Ce dernier offre le double avantage d’être biosourcé et d’avoir une qualité d’usage et de durabilité qui reste jusqu’à preuve du contraire inégalée.
Emy: Mais pensez-vous à des alternatives ?
J.C.: Oui. Au début des années 1970, nous avons été les premiers à faire des sacs et bagages en nylon. À l’époque, c’était une matière nouvelle. Elle offre des qualités de légèreté, de solidité et de durabilité assez uniques. Vous constaterez souvent que des parties des sacs en nylon sont en cuir parce que pour ces parties-là, on ne trouve pas mieux que le cuir. Nous testons de nouveaux matériaux. Beaucoup contiennent une part de végétal et une part de pétrole. La part végétale dépasse rarement la moitié. Les résines à base de pétrole, qu’on est obligé de mélanger, assurent la durabilité du produit.
Il n’y a pas de recette miracle en alternative au cuir
Emy: C’est fondamental…
J.C.: En effet. Je pense que parfois, les défenseurs de l’environnement perdent de vue l’importance de la longévité des produits, un facteur clé de leur impact environnemental. Un sac en feuille d’ananas ne sera pas aussi « eco-friendly » qu’on le dit si vous le jetez au bout de six mois. Nous étudions des alternatives au cuir, mais nous n’avons pas trouvé de recette miracle.
Emy: Envisagez-vous de vous mettre au simili cuir vegan ?
J.C.: Non, mais au cuir végétal, oui. Il s’agit de cuir de vache dont le processus de tannage se fait à partir de végétaux. Deux types de tannage sont possibles : le tannage à base de minéraux, qui est le plus répandu, et celui à partir de végétaux, notamment à partir d’écorce d’arbre broyée qui sert d’agent tannant. C’est le procédé de tannerie le plus ancien.
Emy: Quel type de tannage utilisez-vous ?
J.C.: Les deux, mais comme nos concurrents, nous privilégions le tannage minéral parce qu’il permet une meilleure tenue dans le temps des caractéristiques du cuir. Le cuir ayant reçu un tannage végétal va changer de couleur. Si vous le laissez au soleil, il va bronzer.
Emy: Mais le tannage végétal est-il meilleur pour l’environnement ?
J.C.: Pas forcément. Si l’on utilise l’écorce d’arbre, c’est parce que celle-ci a des agents actifs, des agents chimiques. Ils ont beau être naturels, ils sont toxiques. Au Canada, ils ont arrêté d’y faire appel car cela pollue les rivières. Les agents qui sont dans les écorces des arbres se répandent et tuent les poissons. Il y a aussi des substances chimiques actives. Que le tannage soit minéral ou végétal, ce qui est important c’est que la tannerie respecte bien les limites et les normes de rejet.
Le petit-fils d’une grande lignée
Tanguy: Vous êtes devenu PDG, du jour au lendemain, au décès de votre père. Comment avez-vous vécu cette période ?
J.C.: Je n’ai pas très envie de m’étendre sur cet épisode de ma vie. Je dirai simplement que la transition a été très naturelle sur le plan professionnel. J’exerçais déjà depuis pas mal d’années les fonctions de directeur général.
Bonnie: Ça fait maintenant plus de trente ans que vous avez rejoint l’entreprise familiale. Quel est votre plus beau souvenir chez Longchamp ?
J.C. : Les ouvertures de boutiques à Hongkong, Shanghai, Londres ou New York furent assez mémorables. Les inaugurations d’ateliers en France également. C’est assez difficile pour moi d’isoler un événement qui m’a marqué car il y a une continuité. L’entreprise s’est construite année après année.
Bonnie: Les collaborations artistiques dans le milieu du luxe plaisent énormément. Longchamp s’y est mis également.
J.C.: Il y a eu beaucoup de collaborations artistiques. La première date de 1972 ! Nous avons été assez précurseurs sur le sujet. Personnellement, je suis plus attiré par la collaboration avec des artistes qu’avec des marques, même si les deux peuvent avoir leur légitimité et leur intérêt. Les partenariats avec des artistes permettent de maintenir la marque dans l’actualité et de renouveler l’intérêt de chacun. Elles sont plus exigeantes car les artistes ont l’habitude de travailler sans aucune contrainte ; ils sont par nature très libres dans leur pensée. Pour nous aussi, c’est donc très exigeant… et productif, parce que nous raisonnons davantage en dehors du cadre que lorsque nous travaillons avec une autre marque ou un designer. Les artistes ne sont pas du tout formatés. Leurs propositions sont plus audacieuses, elles nous bousculent, remettent en question nos façons de faire.
Bonnie: Vous avez travaillé récemment avec André et Couturfu. Avec quelle marque ou artiste rêveriez-vous d’établir un partenariat ?
J.C.: Je suis très intéressé par des collaborations avec des artistes qui viennent des arts majeurs – des plasticiens ou des peintres comme Nendo.
Emy: Quel est votre sac Longchamp préféré ?
J.C.: J’utilise un petit portefeuille en agneau que j’ai toujours sur moi. C’est mon objet Longchamp préféré.
Tanguy: En dehors de Longchamp, quelle est votre marque de luxe favorite ?
J.C.: Rapha, une marque de vêtements pour cyclistes.
Bonnie: Du fait de votre héritage familial, le monde de la maroquinerie s’est imposé à vous. Vers quelle voie vous seriez-vous orienté si vous n’aviez pas été un Cassegrain ?
J.C.: J’ai toujours su que je travaillerais dans la maison. Mon plan B aurait été de devenir architecte. Cela m’aurait plu de construire des maisons et des immeubles qui soient à la fois utiles, agréables et esthétiques.
Emy: Vous pratiquez le triathlon et le ski de randonnée. Est-ce le secret pour éviter le burn-out ?
J.C.: Je ne me sens pas du tout proche du burn-out ! Mais le sport contribue effectivement à mon équilibre personnel.
Emy: Avec quel personnage historique aimeriez-vous dîner ?
J.C.: Un voyageur ou un découvreur, comme Magellan.
Published by Thomas Lestavel