Quentin Marquet (X-HEC.23), docteur en pharmacie, et Emmanuelle Gautier (X-HEC.23) ont mis au point une application de suivi de santé pour les femmes. Sur cette interface  B2B, les utilisatrices s’adressent à des professionnels sans devoir attendre leur prochain rendez-vous.

Les entreprises peuvent désormais s’acheter les services d’une plateforme prenant en charge les problématiques de santé de leurs salariées. Emmanuelle et Quentin fêtent cet été les premiers mois d’existence de leur application B2B Gynger. Via cette messagerie, les femmes peuvent poser des questions à des gynécologues, sages-femmes ou aides-soignants et se voient attitrer une sage-femme afin de ne pas changer d’interlocuteur à chaque connexion. « S’il faut les renvoyer vers des spécialistes pour certaines questions, des nutritionnistes ou un radiologue spécialisé en endométriose, il y aura toujours quelqu’un vers qui se tourner », explique Emmanuelle Gautier.

 

Endométriose, SOPK… Le désarroi des patientes

À l’aube de leur projet, les jeunes entrepreneurs avaient ciblé un mal-être chez les patientes à la recherche d’un diagnostic en gynécologie, notamment chez celles atteintes d’endométriose, véritable fléau féminin. L’hiver dernier, l’équipe de Gynger a interrogé plus de 350 patientes que le duo affirme avoir capté via leur présence sur les réseaux sociaux, où ils interagissent avec une communauté de 5000 membres. « On a vu tellement de patientes dans le désarroi. Certaines se sont mêmes effondrées en larmes pendant l’interview », raconte Quentin.

À la source de cette détresse, d’interminables délais pour obtenir un rendez-vous, un parcours de soins chaotique ou la difficulté à se libérer du temps. Le duo décide donc d’adopter une approche plus large, sans négliger pour autant la pathologie spécifique qu’est l’endométriose. « Il s’écoule en moyenne sept ans entre l’apparition des premiers symptômes et l’énoncé d’un diagnostic pour une endométriose, explique Quentin Marquet. Et nous avons constaté que ce problème affectait nos proches. Ma compagne en est atteinte, donc c’est un sujet qui me touche encore plus aujourd’hui. »

Désormais pluridisciplinaire, l’application trouve un écho positif auprès des médecins. En effet, Gynger ne fonctionne pas comme les plateformes de télémédecine, qui bloquent un créneau pour une consultation en direct. Ici, les médecins consultent et répondent aux messages des patientes en asynchrone, « entre deux rendez-vous ou suite à un désistement de dernière minute », et sont rémunérés comme des prestataires au temps passé sur l’application.

Avec ce système, « les patientes situées dans des déserts médicaux, celles qui travaillent beaucoup, finissent tard le soir et ne peuvent pas poser de jours pour une consultation » parviennent à obtenir une réponse à leurs inquiétudes en moins de vingt-quatre heures. Dans ses phases de test, l’équipe de Gynger dit ainsi avoir évité 10% de consultations et réorienté 30% des demandes.

 

La femtech en mal de fonds

Mais pourquoi s’adresser aux entreprises ? « Les difficultés liées à l’écart entre le système de santé global et la santé des femmes ont des répercussions dans le quotidien professionnel, commente Quentin Marquet, cofondateur de Gynger. Le sujet peut même bloquer les progressions de carrière. » La start-up compte déjà des gros clients comme la firme de consulting BCG, les crèches Maison Bleue, ou encore, le média et la plateforme de recherche d’emploi Welcome To The Jungle.

Si Gynger apporte une aide précieuse aux patientes, Emmanuelle Gautier et Quentin Marquet n’ont pas choisi le secteur qui séduit le plus les investisseurs : en 2023, la plus grosse levée de fonds réalisée par une start-up de la femtech, Sonio, s’élevait à 13 millions d’euros. « En France, ce n’est pas énorme, commente Emmanuelle Gautier. Une seule boîte de l’IA peut lever 100 millions [comme Mistral IA, qui a levé 105 millions en 2023, ndlr]. C’est une double peine, parce que statistiquement, les femmes lèvent moins d’argent et les femtech sont cofondées ou fondées à 94% par des femmes. » L’association FemTech France recense aujourd’hui 140 femtechs dans le pays, troisième plus gros écosystème du monde après les États-Unis et le Royaume-Uni.

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