Genèse d’un roman : le destin croisé de familles juive et arménienne au XXe siècle
L’écriture de ce roman, largement biographique, est une succession de coïncidences qui ont fini par ébranler mon indéfectible rationalisme…
En 2022, j’ai 64 ans et suis à la retraite depuis un an, après une carrière bien remplie, d’abord en tant que cadre supérieur dans une banque réunionnaise, puis directeur d’une société d’affacturage avant de me mettre à mon compte en devenant agent général d’assurances pour Allianz (toujours sur l’Ile de la Réunion où je réside depuis près de quarante ans).
La rupture a été volontairement brutale : au moment de transmettre mon cabinet à mes enfants Florent et Virginie (vive la loi Dutreil !), je remets mon téléphone portable à cette dernière, avec l’intégralité des contacts, à la fois privés et professionnels.
Mesure très efficace en termes de business mais qui vous plonge dans un vide relationnel d’une seconde à l’autre en tant que « jeune retraité » ; plus un appel, le silence absolu…
Silence qui me conduit, pour la première fois de ma vie, à regarder en arrière, en essayant de remonter le temps.
Mais dans une famille haute en couleur (une smala, devrais-je dire, avec neuf frères et sœurs) où les non-dits sont légion, je suis vite arrêté dans mes recherches…
Pour autant, je ne lâche rien et finis par obtenir de la part de mes sœurs aînées le nom d’une personne, d’origine arménienne, qui « aurait » aidé mes parents pendant la Seconde Guerre mondiale !
Le fil du vent et de l’oubli est le produit de ces retrouvailles avec les descendants de cette famille à qui mes frères et sœurs devons la vie sauve, car sans ce Krikor, où mon père (juif d’Algérie né français grâce au décret Crémieux, puis « dénaturalisé » sous les lois de Vichy) aurait-il pu se cacher dans la ville de Lyon, dirigé par le tristement célèbre Klaus Barbie ?
Quand de surcroît, je retrouve la trace de l’arrière-petit-neveu de notre bienfaiteur, Laurent (lui aussi d’origine arménienne) sur l’Ile de la Réunion, les coïncidences deviennent troublantes…
Mais quand je lui rends visite sur son lieu de travail, dans la même banque où j’ai passé vingt-cinq ans de ma carrière, juste en face de mon ancien bureau, je ne peux m’empêcher de penser que le sort fait en sorte de réunir à nouveau nos deux familles, 80 ans après ces événements tragiques.
Mais le hasard est têtu puisque, quelques mois après, l’épouse de Laurent donne naissance à un petit Elijah, traduction en hébreu d’Elie, le prénom de mon père… Ce prénom ayant été choisi avant que nous nous rencontrions !
Le fil du vent et de l’oubli est une saga mettant en scène ces deux familles en partant du génocide arménien de 1915 pour se terminer avec l’holocauste ; bien sûr, une partie des événements sont le fruit de mon imagination, comment faire autrement 80 ans après ? Cependant, la trame s’articule autour de faits réels, et surtout le fil a été retissé entre ces deux familles qui s’étaient totalement perdues de vue depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Ce roman est une ode à la tolérance, que je laisse à mes enfants qui ont eu la chance de naître et de vivre sur l’Ile de la Réunion, havre de paix et de concorde entre communautés de couleurs et de religions différentes.
Patrick Aouate (H.81)
Published by La rédaction