Le notoriat à l’heure de l’innovation digitale

Souvent perçu comme traditionnel, le notariat se réinvente grâce à l’intelligence artificielle. Interview croisée de Nicolas Baum, notaire, et Frédéric Ollier, entrepreneur du digital.
Comment est né votre partenariat ?
Frédéric Ollier : Mon expérience m’a amené à réfléchir au lancement d’une solution digitale dédiée à la gestion de la fin de vie et des événements autour du décès. Le projet n’a jamais vu le jour, mais j’avais perçu que le notariat était un environnement propice à l’innovation. Nous avons alors commencé à échanger sur ce sujet.
Nicolas Baum : Je suis frappé par le paradoxe de notre profession : nous avons une certaine culture technologique que ce soit pour la rédaction d’actes, les échanges de données avec des formats spécialisés, les datarooms électroniques, etc. Mais certains de nos outils, comme les tableaux Excel ou les fichiers Word, n’ont pas évolué. Le notariat a très peu profité de la vague de l’IA.
En pratique, comment collaborez-vous ?
NB : Des entrepreneurs et des ingénieurs viennent observer nos méthodes de travail et réfléchissent aux solutions qui pourraient améliorer notre quotidien, ainsi que celui de nos clients.
FO : L’objectif est de comprendre les problématiques auxquelles les professionnels sont confrontés, et construire avec eux des solutions adaptées. Le notariat est très accueillant, car c’est
une profession qui aspire à se moderniser.
Sur quoi travaillez-vous concrètement ?
FO : Une start-up, Louverdi, devrait émerger de ce travail d’incubation. Nous développons un outil qui fait la synthèse entre droit, fiscalité et gestion patrimoniale. L’idée est d’optimiser tout ce qui
peut l’être pour que les notaires puissent se concentrer sur les tâches à forte valeur ajoutée.
NB : Ce projet rendra la relation client plus collaborative. Traditionnellement, les notaires avaient accès à des données dont ils faisaient une analyse afin de la partager avec le client. Notre volonté est d’inclure davantage le client dans l’analyse et la réflexion, de le rendre acteur grâce à des outils de simulation et des agents IA.
Quels cas d’usage envisagez-vous ?
FO : Il peut s’agir de simulations permettant de mieux protéger sa famille et préparer l’avenir, d’accompagner un déménagement à l’étranger en anticipant les implications juridiques et fiscales, ou encore d’optimiser la gestion des emprunts bancaires, en déterminant le moment le plus opportun pour une renégociation. De manière générale, nous avons pour ambition d’offrir un
service extrêmement riche, « boosté par l’IA ».
NB : Les situations familiales et patrimoniales sont de plus en plus complexes : familles recomposées, implantées dans plusieurs pays, volatilité des parcours professionnels… L’objectif est de pouvoir agréger ces données pour faciliter la prise de décision, que ce soit au moment d’investir, de constituer une retraite, de donner à ses enfants ou de se marier. Analyser, simuler, décider, c’est ce que la technologie nous permettra d’optimiser.
Nicolas Baum (E.14) : Diplômé d’HEC et de Paris II, il est associé gérant de l’étude Baum depuis 2004. Il est par ailleurs professeur affilié à l’ESTP Cachan et auteur pour les éditions LexisNexis.
Baum Notaires : Fondée au XIXe siècle, l’étude parisienne compte aujourd’hui six notaires associés et une soixantaine de personnes. Elle s’organise autour de neuf métiers, du conseil en financement immobilier
au droit de la famille.

Frédéric Ollier : Diplômé de Polytechnique, il a participé à plusieurs aventures entrepreneuriales dans le digital dans les domaines de la mobilité, de la psychologie en ligne et aujourd’hui du juridique.


Published by La rédaction